Moi, Grand Corps Malade, je suis interdit de concert : je ne compte pas me taire

Publié le par Front de Gauche de Pierre Bénite

Moi, Grand Corps Malade, je suis interdit de concert : je ne compte pas me taire

L'artiste Grand Corps Malade devait être en concert le 21 mai prochain au Théâtre neuf du Blanc-Mesnil. Mais la présence annoncée de Rachid Taxi n'a pas été appréciée par la municipalité qui a décidé d'annuler le concert de l'artiste.

Pour Grand Corps Malade, cette décision n'a aucun sens. Il s'explique.

Le coup de fil était inattendu. Le programmateur de la salle du Blanc-Mesnil, le Théâtre neuf, m’informait d’un souci pour mon concert du 21 mai du Funambule Tour. À savoir qu’il s’était dit dans les couloirs de la mairie que je ferais monter sur scène, pour chanter en duo avec moi "Inch’Allah", Rachid Amghar, celui qu’on appelle entre nous Rachid Taxi… Ce n’était ni une exclu ni confidentiel, ce duo j’essaye toujours de le chanter avec Rachid, quand il est disponible pour me rejoindre sur scène. Sur scène, je ne fais que partager ma musique.

Au bout du fil on me précise que le souci est réel, qu’on a peur à la mairie, que Rachid ne se serve de ma scène comme d’une tribune politique, qu’il ne se contente pas de chanter. Il faut ici ajouter, pour que cette inquiétude prenne tout son sens, que Le Blanc-Mesnil est à la fois ma ville de naissance et celle de Rachid qui, fidèle à ses valeurs, est un citoyen engagé qui n’hésite pas à prendre la parole dans cette municipalité récemment élue.

Faut-il préciser pourtant que jamais je n’ai utilisé mes scènes pour faire passer autre chose que mes textes et ma musique, que je considère assez porteurs de mes valeurs pour ne pas en rajouter ?

Et quand bien même, ne serait-ce pas la liberté d’un artiste de partager ce moment comme il l’entend avec les spectateurs qui sont venus, payant leur place, l’écouter. Parce qu’ils aiment sa musique mais aussi pour ce qu’il est ? C’est ce que j’ai répondu au programmateur et à la municipalité. Les assurant, y compris par écrit, du statut purement "artistique" de la participation de Rachid au concert. Il faut croire que ma parole, celle de mon producteur et celle de Rachid ne suffisaient pas.

Interdit de parole et de musique, je ne compte pas me taire.

Le courrier est arrivé par recommandé, annulant purement et simplement un concert déjà rempli aux deux tiers. Pour des raisons d’assurance. Le Funambule Tour ne passera pas par Le Blanc-Mesnil, parce que la municipalité a pris peur de la potentielle phrase d’un citoyen concerné.

Me voilà de fait dissident politique, interdit de parole et de musique. Qu’attendait la municipalité ? Que je me taise ? Que je laisse les spectateurs face à une annulation que je n’ai pas choisie ? Qu’à un moment où on ne parle que de liberté d’expression, de la façon de la sauvegarder, de la façon de la protéger, je nous laisse condamner au silence, moi et mon ami qui ne voulions, finalement, que chanter ? Car c’est bien là que le sort est joueur : ce duo sur "Inch’Allah", si nous le chantons ensemble, c’est qu’il nous ressemble.

Nous ne l’avons jamais vu que comme un appel à faire se rejoindre tous ceux qui l’écoutent dans une même fête pleine d’espérance. Dans un moment de musique nous chantons "le son qui éclaire, qui partage, qui rassemble".

Rachid Taxi et moi, nous continuerons à chanter fort des paroles salutaires, qui terminent un concert où la musique est reine par un moment festif, où le public souvent se lève et danse. Un moment unique, pour les artistes que nous sommes, la communion de tous autour d’une chanson qui porte haut nos valeurs d’espoir, de mixité et de partage. Simplement.

Nous aimons clamer haut et fort "si on chantait de toutes les couleurs, on va faire danser, les corps et les cœurs. Si on est tous ensemble, ça nous suffira. Si nos voix se rassemblent, on nous entendra. Inch’Allah".

Alors non, on ne va pas se taire malgré cette annulation, et que la municipalité se rassure : nous ne chanterons pas au Théâtre neuf. Mais Rachid Amghar et moi nous continuerons à chanter fort et partout ailleurs, Inch’Allah.

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