Congrès 2018 : une contribution de Jean Marc Durand
Un 38ème congrès extraordinaire pour un réarmement idéologique et stratégique du PCF.
Les adhérents du parti communiste français, en votant un texte de base commune de discussions autre que celui proposé par la direction sortante, ont fait preuve d’une grande maturité politique. Ils ont en même temps démontré leur sens de s responsabilités. Dans nombre d’organisations un tel événement aurait conduit à la division, à l’éclatement et à une disparition certaine. Or force est de constater que c’est le contraire de ce qu’il passe aujourd’hui au Pcf. Cela, parce que c’est le contraire de ce que veulent les porteurs du texte arrivé en tête.
Le message qu’ils ont aussitôt envoyé est en effet totalement explicite rejoignant ainsi totalement le souhait d’une très large majorité de communistes. Ce qu’il convient de qualifier de révolution au sens étymologique du terme, prend ainsi tout son sens.
En arrière-plan est en effet la recherche par une majorité de communistes d’une nouvelle orientation pour leur parti, d’un nouvel essor après les échecs successifs enregistrés. Et pour parvenir à dépasser la situation actuelle, pour atteindre ces objectifs, les communistes ont conscience que le meilleur moyen est d’une part de rester rassemblés et d’autre part, de réaliser ce rassemblement à partir d’un travail collectif de construction de la nouvelle orientation de leur parti dans le cadre d’un débat approfondi sur les contenus de son projet, ses objectifs stratégiques et son fonctionnement.
L’essentiel réside dans le travail, le débat sur les idées et non dans une bataille d’égo ou de personnes ou autour de postures.
Les communistes ont conscience qu’il est nécessaire de réarmer idéologiquement leur parti pour faire face aux défis de ce 21ème siècle naissant. L’annonce d’un nouvel épisode de la crise systémique bien plus fort que celui de 2008/2009 renforce cette prise de conscience. Cinq questions sont en effet au cœur de la lutte sans merci que mène le capitalisme dans sa phase financiarisée et ultralibérale. A savoir :
- L’argent, son utilisation c’est-à-dire le rôle des banques ; des banques de dépôt à l’action décisive de la BCE. Il s’agit de mettre l’immense puissance de ces institutions, c’est-à-dire leur capacité de création monétaire, au service du développement humain et non de la soumettre aux diktats des marchés financiers. Mais il est aussi question de l’utilisation de l’argent des entreprises comme celui de l’Etat ce qui implique une grande réforme de la politique fiscale afin de lutter efficacement contre l’évasion fiscale et son corollaire, les paradis fiscaux, outils stratégiques du système bancaire.
- La démocratie avec au centre de son évolution, la création de nouvelles institutions placées sous le contrôle des populations avec des salariés dans les entreprises et des citoyens dans la cité, disposant de pouvoirs nouveaux d’interventions et de décisions dans les choix de gestion.
- Le développement des services publics comme moyen de répondre aux besoins sociaux des populations mais aussi comme opportunité d’offrir d’autres débouchés à l’argent pour une nouvelle efficacité sociale et environnementale contre les gâchis financiers.
- L’écologie vue non pas comme un supplément d’âme, mais comme une dimension à part entière de la lutte des classes contre l’exploitation capitaliste et particulièrement de la bataille contre la toute puissance des marchés financiers et leur recherche jamais assouvie de la plus forte rentabilité.
- Le féminisme et toutes les dominations et discriminations qui bien que classées dans le catégorie sociétale sont également étroitement liés à la façon de considérer l’être humain comme objectif central du développement de la société et non comme une simple valeur qu’il s’agirait de classer selon un système de « performances » ou selon des critères dictés par l’idéologie dominante, c’est-à-dire de la morale bourgeoise qui ne vise en fait qu’à justifier et à faire accepter l’exploitation capitaliste.
Et quel meilleur lieu pour prendre à bras le corps ces questions que les lieux où se concrétise tous les jours cette exploitation, c’est-à-dire les lieux de travail. Emplois, salaires, droits et garanties, discriminations (sexe, origine, âge…) toutes ces questions ne sont-elles pas liées aux modes de production, à leur conception, à leur organisation et ainsi à la répartition de la richesse créée.
Il y a de ce point de vue urgence pour le parti communiste à retrouver non seulement une expression claire en direction des lieux de travail mais aussi à y proposer la présence de l’activité et de l’organisation politique. C’est une question de rayonnement de notre projet politique mais bien plus que cela, de capacité réelle à engager la transformation de la société.
Du travail sur l’ensemble de ces questions dépend la définition d’une ligne claire de contre-attaque et de propositions pour aller vers un dépassement réussi de cette exploitation et de toutes les dominations qui l’accompagnent.
C’est de ce processus que devront découler les choix des communistes en matière d’organisation, de fonctionnement et de direction de leur parti
N’est-ce pas la meilleure façon pour disposer à nouveau d’un parti communiste opérationnel, en phase avec notre peuple ? Un parti qui sera ainsi capable de rassembler largement en son sein comme de créer les conditions d’un ressaisissement à gauche jusqu’à un rassemblement des forces qui la compose sur des objectifs précis de transformation sociale qui soient compris et par partagés par le peuple ? Sans doute une voie à creuser pour redonner confiance en la gauche. !
Jean Marc Durand