Santé : le cri d’alarme des hôpitaux...

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Santé : le cri d’alarme des hôpitaux...

Les députés adoptent demain le budget 2019 pour la sécurité sociale. Pour la première fois, tous les établissements hospitaliers réclament ensemble une bouffée d’oxygène.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale doit être adopté par les députés en première lecture demain. Au passage, et malgré une nouvelle hausse des dépenses de santé, il actera un retour à l’équilibre des comptes de la sécu avec un excédent de 700 M€.

Une première depuis dix huit ans ! Certes mais à quel prix, pour les patients, les salariés et les structures hospitalières mises à mal depuis les lois Bachelot, Touraine et maintenant Buzyn alors que la cotisation sociale n'a pas augmenté. De ce fait la contribution des entreprises à la solidarité nationale est plus faible, de quoi réjouir les actionnaires !

Ainsi les difficultés des établissements de soins s’aggravent et les déficits perdurent. La tension est telle que, pour la première fois, les quatre fédérations hospitalières — la Fédération hospitalière de France (hôpitaux publics), la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), la Fehap et Unicancer —, qui représentent hôpitaux publics, privés, privés à but non lucratif et centres de cancérologie, soit tous les établissements de soins, lanceront ensemble demain « un cri d’alarme sur la dégradation des conditions d’activités de soins ».

Et les 2 Mds€ de dépenses supplémentaires affectées aux hôpitaux par le futur budget 2019 de la sécurité sociale, sont largement en dessous des besoins et ne suffisent pas à calmer les inquiétudes voire la colère des professionnels de santé, des syndicats, des salariés et des patients en général solidaires..

Parmi les problèmes récurrents, ils sont au nombre de trois : tout d'abord le manque de personnels dans la quasi totalité des établissements, ce qui à généré des mobilisations sociales importantes depuis plus de 2 ans, ensuite l'éloignement des structures de proximité qui accompagne les restructurations en cours avec leurs fermetures de sites ou leur affaiblissement, enfin celui de la maîtrise de l’évolution naturelle des dépenses.

Face au mécontentement le ministère a du admettre que cette hausse est liée, de manière quasi mécanique, à l’évolution des salaires.

Si les libéraux ne sont pas mécontents du plan Ma santé 2022, présenté par Emmanuel Macron, cela n'est pas le cas des salariés, des professionnels de la santé dont les représentants estiment ne pas pouvoir attendre cinq ans les effets de ce plan : des mesures urgentes s’imposent, clament -ils et ils ont décidé de se faire entendre!

Pour les 900 hôpitaux publics par exemple, la Fédération hospitalière de France (FHF) évalue déjà le cumul des déficits à 1 Md€ pour 2018. Motif essentiel : « On a encore demandé aux hôpitaux de faire 960 M€ d’économies en 2018 pour compenser la hausse naturelle des dépenses. La hausse d’activité des hôpitaux prévue pour 2018 a encore été surévaluée pour mieux justifier une nouvelle baisse de tarif des actes, explique Frédéric Valletoux, président de la FHF. Les recettes attendues sont d’autant moins au rendez-vous que, parallèlement, les tarifs ont baissé de 0,5 % cette année après 0,9 % en 2017. »

Et pour 2019 ? « Cela ne va pas changer, dit-il, car l’hôpital est prié de réduire ses dépenses de 650 M€. Nous estimons que le déficit des hôpitaux dépassera le milliard en 2019. »

Selon la directrice financière de la FHF, Cécile Chevance, « le budget 2019 des hôpitaux est à nouveau construit sur une injonction contradictoire : d’un côté, le ministère impose une baisse importante des tarifs de remboursement des actes en expliquant que cela sera compensé par la hausse du nombre d’actes, mais, de l’autre, il demande aux hôpitaux de développer l’activité ambulatoire qui a vocation, elle, à réduire la durée des séjours. Les tarifs vont donc encore baisser en même temps que vont baisser les volumes. »

Même les plus gros établissements sont affectés par le virus du déficit chronique Un cercle infernal qui ne prend pas en compte la très forte dette des hôpitaux, évaluée en février à 29,3 Mds€ pour 2016 par la Cour des comptes, qui révélait qu’en 2015, 319 hôpitaux — soit un sur trois — étaient « en situation d’endettement excessif ». « Cette dette se stabilise mais c’est au prix d’une baisse des investissements », constate Cécile Chevance. Ce manque d'investissement que paie très cher les usagers, les salariés et la santé en général.

Même les plus gros établissements sont gravement affectés par le virus du déficit chronique, à l’instar du CHU de Nancy* (l’un des dix plus gros hôpitaux de France), qui prévoit pour 2018 une perte de 290 M€, soit un tiers de son budget. Une dégradation telle que l’hôpital en quasi-cessation de paiement n’a pas pu payer ses charges sociales du troisième trimestre.

Du côté des petits hôpitaux, cela ne va guère mieux. Dans le Nord, l’hôpital d’Armentières a été placé sous tutelle début octobre. Son déficit attendu pour 2018 devrait atteindre 5 M€.

Quant au centre hospitalier de Falaise (Calvados), endetté à hauteur de 15 M€ depuis 2012, il est soumis à un plan de redressement drastique…

Dans ce contexte, et en attendant les effets du plan Ma santé 2022, Frédéric Valletoux a déposé sur la table de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, une série de propositions dont une à laquelle le président de la FHF est particulièrement attaché : « le gel de la baisse des tarifs sur la base desquels sont encore largement rémunérés les hôpitaux ». ■

*Le CHU de Nancy (Meurthe-et-Moselle), l’un des plus gros hôpitaux de France qui prévoit 290 M€ de pertes pour l’année 2018, est en quasi-cessation de paiement. Le CHU de Nancy (Meurthe-et-Moselle), l’un des plus gros hôpitaux de France qui prévoit 290 M€ de pertes pour l’année 2018, est en quasi-cessation de paiement.
 

Publié dans Politique nationale

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