Sous la réforme des retraites, avec l'intervention citoyenne inédite, la gauche, la droite et Macron au pied du mur.

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Sous la réforme des retraites, avec l'intervention citoyenne inédite, la gauche, la droite et Macron au pied du mur.

Depuis septembre les retraites monopolisent les ondes, les télés et les journaux. Après 5 mois, les grèves se poursuivent dans nombre de professions contre une réforme toujours aussi rejetée par l'opinion publique.

Macron n'a pas encore retiré son projet mais il a déjà perdu la bataille. Son entêtement l'oblige à passer en force. Il est devenu la cible des Français qui le montrent du doigt au point d'être lâché par certains députés macronistes qui ne supportent plus son arrogance et son autoritarisme et qui pensent que leur carrière personnelle ne peut plus être arimées à la sienne, car un homme politique qui n'écoute pas son peuple, est en sursis. Le quinquennat Macron est déjà terminé !

Pourtant il continue à jouer un jeu pervers et très dangereux en comptant sur l'usure des grèvistes cheminots ou de la RATP. D'autres professions ont pris le relais et dans le pays de multitudes d'actions sont prises chaque jour par les organisations syndicales qui créent dans tout le pays un climat quasi insurrectionnel.

Edouard Philippe a du sortir son bâton et promet des « sanctions » alors que les policiers usent leur matraque sur la tête de manifestants pacifiques. Dans le même temps, la droite semble égarée par tant de mobilisations. Elle tente d'occuper le terrain institutionnel, elle aussi dénonce « un texte à trou » qui arrive au débat parlementaire.

Hypocritique, elle se demande bien pourquoi cette réforme a été faite : instaurer un système par points ? Organiser une redistribution des richesses ? Allonger le temps de travail ? Réduire les pensions comme le laisser supposer Fillon ?

Comme l'exécutif, la droite au début était silencieuse. Il est vrai que le gouvernement a été long à concevoir sa stratégie pour cacher ses ambitions réelles. La droite ne pouvait combattre une réforme dont elle ne savait pas sur quoi elle déboucherait. Au mieux, elle prit soin de rappeler qu'elle était favorable au fameux "travailler plus et gagner moins en retraite" conformément au dogme libéral : "on ne va pas quand même payer des gens à ne rien faire !" (retraite, congés payés, réduction du temps de travail, etc.). 

Si Macron et droite trainaient des pieds, par contre les forces de gauche et notamment le parti communiste et les syndicats s'en sont saisis. Il leur a donc fallu abattre leurs cartes. Début décembre, le gouvernement annonçait en partie la couleur, mais il aura fallu un mois de grève et plus d'un million de manifestants dans les rues des villes du pays à trois reprises.

L'exécutif a alors décidé d'un calendrier précipité pour battre le mouvement social et d'une réforme complexe en ne mettant pas tout sur la table. Il fallait trouver des totems expliqua alors un conseiller, « se battre sur des mesures qui disent politiquement quelque chose ». L'âge pivot et la fin des régimes spéciaux sont retenus. Cela parle à la droite et permet de diviser les Français. Mais l'opinion publique le rappelle à l'ordre : "cette réforme n'est pas bonne, on en veut pas, on veut autre chose."

Alors qu'il escomptait que les fêtes mettraient fin à la grève, il n'en fut rien le conflit dure et s'éternise toujours. L'exécutif cherche, puis trouve un terrain d'entente avec la CFDT qui n'a jamais participé au mouvement, qui est donc peu crédible. En réalité, il parle cette fois à la social-démocratie notamment macroniste qui a signé une pétition demandant qu'une main soit tendue à Berger. Il espère adoucir les électeurs venus du PS qui avaient choisi Macron au premier tour de 2017… mais le système par points, traine, l'âge pivot recule, ce qui fait monter la droite au créneau car voyant s'éloigner ses propres conceptions de la retraite.

Edouard Philippe y est très sensible, il essaie de contenter tout le monde dans sa lettre aux syndicats. Il satisfait Berger en retirant provisoirement l'âge pivot et deux lignes plus loin il satisfait la droite avec l'âge d'équilibre qui repousse le droit à partir sans décote et constitue l'outil pour baisser les pensions et contenir le coût des retraites dans la fameuse règle d'or : 14% du PIB, pas plus !

La droite jubile, leur poulain Edouard Philippe l'a écoutée alors que Berger peut être content avant d'être cocu. Mais le principal est de gagner du temps sur la grève qui se prolonge et d'organiser le passage en force à l'Assemblée.

Car les partenaires sociaux ne vont pas trouver des mesures d'équilibre, crédibles hors des contraintes fixés par l'exécutif. Que fera l'Assemblée… ? Le feuilleton ne fait que commencer.

L'entente avec la CFDT et la question du financement vont continuer à focaliser le débat sur la question budgétaire qui finalement est bien le coeur du problème qui cache les reculs organisés par ailleurs dans le projet de loi et qui donnent à cette réforme son caractère injuste, inégalitaire, anti-féministe avec en plus une ouverture à l'assurantiel et aux fonds de pension que l'Humanité a révélé au grand public avec l'affaire BlackRock.

Les 1.000 euros minimum qui existent déjà, les carrières hachées sont mal prises en compte, l'idée saugrenue d'aller rechercher les personnes hors système pour les remettre dedans, la multiplication des régimes particuliers lâchés sous la pression de la rue, tout cela ne passe pas tant à gauche qu'à droite pour des raisons diamétralement opposées liées à la conception de la société que chacun a, avec la place que les retraités doivent occuper et veulent occuper.

Un parlementaire LREM reconnaît, « voulions-nous vraiment qu'on nous entende ? » Le futur système est si mauvais qu'il pénalise y compris les hauts cadres… « nos électeurs ».

La gauche sous l'impulsion du PC a repris l'offensive et reprend par diverses voies le terrain du soutien aux syndicats et aux grévistes et aussi celui de l'alternative avec des propositions de progrès social et de civilisation qui sont déjà signées par des centaines d'économistes, de syndicalistes, de chercheurs, de personnalités politiques.

La droite quant à elle hésite toujours entre le durcissement de la réforme ou son retrait pur et simple afin de ne pas lâcher à la rue et aux progressistes une réforme qui serait contraire à ses conceptions de la société tournées vers l'individualisme et le laisser faire des entreprises.

Le seul grand perdant dans cette affaire mal ficelée, voulue à la hussarde, est finalement le chef de l'Etat.

Sa stratégie "la gauche et la droite en même temps" est en échec, parce que tout simplement les citoyennes et les citoyens ont décidé d'être pleinement acteurs de leur destin, de leur vie future et de celle de leurs enfants et petits enfants.

Et dans ce cas là, seule la gauche avec ses valeurs sont à même de les accompagner. Il est temps !

 

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