A quelques jour de Ségur (élaboration d'un plan pour la santé) poser clairement les objectifs : beoins - moyens et pouvoirs à conquérir !

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

A quelques jour de Ségur (élaboration d'un plan pour la santé) poser clairement les objectifs : beoins - moyens et pouvoirs à conquérir !

Pour face à la crise sanitaire et à leurs obligations vis à vis des patients les soignants ont repris le pouvoir dans nombre d'hôpitaux au détriment d'une haute-administration et d'un encadrement tout puissants. Comment tirer partie de cette expérience inédite, comment la pérenniser et la généraliser à l'ensemble des entreprises qu'elles soient du public ou du privé.

Les soignants comme les patients et les citoyens sont en colère. Les uns par une surcharge de travail inadmissible découlant d'une politique publique qui a sacrifié (restructurations, fermetures de sites, réduction de lits et de soignants) l'hôpital public au nom de la réduction des coûts imposés avec des budgets d'austérité alignés sur les exigences de l'Europe et les patients comme les citoyens de l'insécurité qu'on leur impose de fait.

Cette réduction de la dépense publique, le libre-échange aggravé par les traités européens et la désindustrialisation massive du pays en découlant couplée à l'application des critères de gestion du privé (flexibilité, juste à temps, flux tendu ou encore stock zéro) ont conduit notre système de santé à manquer de tout : de lits de réanimation, de soignants et de médecins, de masques, des tests ou du gel hydro-alcoolique.

Cette dégradation contraire à l'intérêt général provient en partie de la loi HPST qui a évincé les soignants, les personnels de leur pouvoir d'intervention et parfois de décision. Résultat, la politique de santé a été conduite directement par les gouvernements et la haute administration avec les Agences Régionales de Santé (ARS) comme bras armé dans les Régions et les directions d'hôpital qui au nom de la baisse des coûts imposée ont maltraité les soignants et l'ensemble de notre système de santé.

Cette organisation bureaucratique a créé un affrontement entre deux objectifs contradictoire, l'un qui est de soigner porté par les soignants avec la solidarité des patients et des citoyens et l'autre qui fait marcher la calculette de réduction des coûts porté par l’administration et les gestionnaires de l'hôpital. Cela a provoqué des souffrances terribles et de la colère qui s'est de plus en plus exprimée dans les luttes sociales qui durent depuis plus d'un an.

Malgré les protestations, les grèves, les manifestations, la multiplication de journées de mobilisations, les démissions de nombreux chefs de service des hôpitaux publics, rien n'y a fait, le pouvoir politique a refusé d'entendre. Les gouvernements successifs et leur haut-fonctionnaires ont poursuivi méthodiquement leur travail de sape : réduire le nombre de soignants, précariser le salariat hospitalier et diminuer les capacités hospitalières.

L'épidémie COVID 19, a provoqué une crise sanitaire sans précédent et sous tous ses aspects, dans l'hôpital, nous constatons partout le rapport de force a changé.

En ville ou à la campagne, les professionnels libéraux se sont regroupés pour faire naître des solidarités nouvelles et soulager leurs collègues hospitaliers. De nombreux maires et de citoyens, associations, militants syndicaux et politiques ont joué un rôle concret et rapide pour faciliter le travail des soignants, sécuriser les malades.

A l'hôpital, la réorganisation et l'ouverture en urgence de lits pour faire face à l'épidémie a été possible parce que les soignants ont pris la direction des opérations obligeant l'administration à suivre. Actuellement, la crise semble contrôlée à l'hôpital mais au prix de l'abandon de tous les soins courants non urgents en clinique privée comme à l'hôpital. Ce qui n'est pas admissible et ne doit plus jamais se reproduire.

A la faveur de la crise, le pouvoir a basculé des gestionnaires diplômés à "la calculette" des coûts vers les soignants. Ceux-ci doivent se rappeler cette évidence : ils peuvent se passer des tutelles administratives et bureaucratiques alors que, sans les soignants et les personnels administratifs qui leur sont liés, il n'y a plus de système de santé.

Bien sur, ce basculement de pouvoir n'est pas le résultat d'un processus conscient établi mais avant tout celui de l'urgence à agir face à la pandémie. Ceci étant précisé, l'expérience ainsi acquise permet de l'envisager dans la durée pour qu'il soit officiellement reconnu. Cela devrait être au coeur des luttes dans la santé ces prochaines semaines tout comme au centre des discussions qui vont s'engager à Ségur sur le nouveau plan gouvernemental sur la santé.

N'est ce pas inscrire ces actions dans la mobilisation pour la conquête de pouvoirs nouveaux pour les salariés afin de changer les objectifs et les critères de gestion de l'hôpital et de notre système de santé pour faire du patient et de sa sécurité la priorité contre la chasse aux coûts et le non investissement.

Les soignants, les personnels et les citoyens doivent diriger leur colère contre les vrais responsables : les anciens gouvernements et l'actuel, qui ont avec la haute administration mis en oeuvre des transformations dont ni les populations ni les soignants et ni les personnels ne voulaient.

Cette technocratie a failli en restant sourde à la colère des soignants, des patients et des citoyens. Elle a failli en ne remettant jamais en question les traités européens responsables d’une politique budgétaire et industrielle insensée nous rendant incapables de fournir les protections nécessaires pour les soignants et la population.

Le confinement général obligé est le fruit direct de ces faillites. Sans dépistage de masse, sans protection, il était de fait l’unique solution disponible. Au final, la haute-administration et le gouvernement ont perdu toute légitimité face à cette crise.

Macron a admis implicitement ces erreurs, mais cela ne suffit pas, il faut des actes concrets immédiats pour que la crise débouche sur une politique radicalement différente :

1- Sortir l’hôpital public d’une pure logique comptable en supprimant la tarification majoritaire à l’activité.

2 - Immédiatement 10 milliards d'€ doivent être affectés à la santé avec trois objectifs : le recrutement de 100 000 emplois dans l'hôpital public, 100 000 emplois dans les EHPAD et 300 € d'augmentation des salaires et le paiement de toutes les heures supplémentaires et astreintes effectuées par l'ensemble du personnel hospitalier pendant cette crise.

3 - Le versement de la même prime exceptionnelle à tous les soignants hospitaliers, sans distinction de zone géographique ou de service, qu'ils soient en secteur COVID ou pas.

4 - La suppression du Numérus Clausus afin que le nombre de place en formation universitaire de médecine permette de répondre aux besoins de toutes les spécialités.

5 - La mise en place d'un grand plan de formation professionnelle visant à répondre aux besoins des personnels et leur permettre d'alterner librement des périodes de formation qualifiante et des périodes de travail en garantissant l'emploi de chacun, un revenu de formation garanti et leur remplacement effectif dans leur service (soignant ou administratif) quand ils sont en formation.

5 - Une augmentation drastique du nombre de lits et l'arrêt de toutes les restructurations et fermetures en cours.

6 - Le renforcement de la médecine de ville et des centres de santé en associant étroitement les acteurs de terrain, soignants - syndicats et élus-es.

7 - Créer des comités de mobilisations locaux avec la participation des représentants de l'hôpital, des médecins libéraux, du préfet, de l'ARS, de la Sécurité Sociale, des syndicats, des partis politiques et des élus-es pour recenser les besoins (emplois, formations, investissements) définir les réponses et transformer les Plan Régionaux de santé tout en contrôlant et orientant l'utilisation des fonds publics.

8- Partager le pouvoir décisionnaire entre les soignants, les personnels, les syndicats, les usagers et l’administration dans tous les points névralgiques du système de santé : hôpital, ARS, Sécurité Sociale.

9- Remettre en question les traités européens actuels incompatibles avec une politique de santé conforme à l’intérêt général et mettre en place un fonds européen économique, social et environnemental alimenté par la BCE pour le développement de tous les services publics en Europe sur la base des projets de chaque Etat de l'UE.

La crise sanitaire que l'on traverse démontre qu’il est possible de faire autrement sur la base d'une nouvelle logique : satisfaction des besoins - moyens pour les satisfaire - pouvoirs d'intervention et de décision nouveaux pour les acteurs de la santé.

Les personnels de santé sont très favorables à de tels changements. Ils ne seraient plus réduits à gérer la pénurie et l'austérité mais seraient pleinement acteurs d’une construction collective visant à faire des êtres humains et de leur santé la motivation première de tout notre système de santé.

 

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