Les communistes de l’aéro à l’offensive

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Les communistes de l’aéro à l’offensive

Le collectif national aérospatial s’est réuni à mi-octobre afin de faire le point de la situation et d’être force de propositions et d’initiatives politiques. Malgré les 15 milliards promis par le gouvernement à l’aérien, la réalité concrète est faite de plans de casse de l’emploi et de régression sociale.

Avec ses 350 000 salariés, l’industrie aérospatiale constitue pourtant un atout pour l’avenir de notre pays, tout comme la filière du transport aérien qui emploi plus d’un million de personnes (1). Elle est une source de progrès technologiques majeurs en participant à la résolution des grands problèmes qui se posent à notre monde globalisé, à commencer par la crise climatique.

Notre parti se félicite que l’activité civile soit aujourd’hui l’élément moteur de cette industrie. Il s’est toujours prononcé pour une industrie aérospatiale forte, dans le cadre de coopérations européennes et internationales maîtrisées, garantissant l’indépendance technologique face aux États-Unis et aux fonds financiers.

Sur les plateformes aéroportuaires la situation s’aggrave, entraînant destructions d’emplois et des faillites malgré les soutiens publics. Les aéroports sont quasi déserts et l’été n’a pas apporté la bouffée d’oxygène espérée.

Pour Airbus, un PSE (2) se négocie avec signature d’un accord de chômage partiel par la CGC, la CFTC et FO. Seulement 10 000 salariés sur 30 000 vont intégrer le dispositif de chômage partiel, ouvrant ainsi la voie à un accord de compétitivité attaquant les acquis sociaux. Les possibilités de chômage partiel et de départ de salariés en retraite anticipée ne sont pas exploitées au maximum pour permettre à la direction d’imposer l’accord de compétitivité sous menace de licenciements secs. Les charges de travail remontent avec la livraison de 57 avions en septembre et des remontées de cadence forte pour la famille des moyens courriers A320 (3) dès le début 2021. L’A321 sera l’un des avions de sortie de crise, d’où le besoin de la nouvelle chaîne d’assemblage à Toulouse pour sa version XLR transatlantique. Le carnet de commandes est toujours de plus de 7 400 avions à fabriquer et il est prévu de livrer plus de 500 avions en 2020 et plus de 600 en 2021. Les marchés chinois et d’Europe de l’Est font preuve d’une grande résilience et captent une grande partie des livraisons.

Boeing est dans une situation catastrophique sur le secteur civil et ne sera sauvé que par les commandes du Pentagone.

Chez Thalès, malgré les aides de l’État, la suppression de 1 200 emplois dont nombre d’ingénieurs est annoncée. Elle ne se soldera pas obligatoirement par des licenciements secs : des ingénieurs iront travailler ailleurs... sur des domaines sur lesquels ils n’ont aucune expertise. Des postes vont être délocalisés en Inde dans une filiale de droit français qui donc pourrait bénéficier des aides de l’État.

À Safran, le débat se développe autour des idées que la pandémie n’explique pas tout et que l’histoire de l’industrie aéronautique montre que celle-ci dépend des cycles du transport aérien.

C’est pourquoi un système de sécurité emploi-formation-revenus, qui exclurait le chômage, serait une alternative à l’accord que la direction Safran a imposé.

Limité à des mesures pour faciliter les départs de Safran, cet accord, obtenu sous menace de licenciements secs, ne répondra pas aux besoins des salariés. Safran avait prévu en mai le versement de plus d’un milliard d’euros de dividendes. Ce coût du capital est à mettre en regard avec une masse salariale de cinq milliards. Ce versement a été annulé au dernier moment alors qu’était annoncé un renforcement des mesures de compétitivité dans la production, et une diminution des dépenses en recherche et développement de 20 à 30%. C’est pourquoi les fonds publics de Safran ne devraient pas financer l’intensification du travail et les suppressions d’emplois, mais devraient aller à la recherche & développement.

Pour les sous-traitants qui n’ont ni la trésorerie d’Airbus ni d’aides d’État, les PSE vont se multiplier avec des disparitions ou des rachats par des fonds financiers étrangers vautours, entraînant des délocalisations et nuisant à la sortie de crise.

Dans l’ensemble du secteur, la situation du personnel et de l’emploi se dégrade. Les effectifs de productions, d’études et même des services associés sont menacés. Les salariés des sociétés de sous-traitance, les salariés intérimaires sont en première ligne pour être licenciés.

L’actuelle mise à l’arrêt du transport aérien sur toute la planète hors sud-est asiatique a un terrible impact sur tout le secteur. Mais les directions des grands groupes exploitent cette situation réelle pour travailler la remise en cause de l’ensemble des acquis et conquêtes sociales. Il s’agit d’un effet d’aubaine.

Si sur l’avion « propre » ou « décarboné » des études sont engagées, dans le même temps les grands groupes entendent diminuer leur effort en recherche et développement pour protéger la rétribution des actionnaires. Le marché du carbone, les bas prix du pétrole, les actuelles et futures taxations aveugles du transport aérien ne peuvent que conduire les compagnies à ne pas renouveler leur flotte pour des avions plus propres (4). Les mesures contre les lignes intérieures devraient pousser les compagnies aériennes à affréter des TVG, concurrençant ainsi la SNCF, alors qu’au contraire on devrait rechercher la complémentarité entre train et avion.

Tout ne doit pas être misé sur l’avion à hydrogène. Certes celui-ci est technologiquement possible (5), mais il implique, pour répondre de manière industrielle au transport aérien, la création de toute une filière de l’hydrogène propre qui n’existe pas encore, allant de la production par électricité décarbonée (6) aux installations aéroportuaires. Ce n’est pas impossible, contrairement aux dires de certains lobbies, mais cela demande du temps et de très importants investissements.

Sur le budget des armées, le gouvernement ne s’inscrit pas dans une logique de défense nationale, il vise à soutenir avant tout les grands groupes de l’industrie d’armement.

S’il est nécessaire de préserver des outils industriels nationaux pour avoir les équipements nécessaires à la défense du pays, cela ne peut justifier de subventionner des entreprises privées à l’actionnariat flottant ou étranger par la commande publique.

Un pôle public des industries de défense est donc indispensable, avec des nationalisations ainsi que des remontées de la part de l’État dans le capital d‘entreprises comme Airbus. Il faut une filière stratégique publique duale des industries de souveraineté qui, en lien avec une politique de sécurité collective préparant à un désarmement multilatéral, organiserait sa reconversion vers des productions civiles.

Le Collectif Aéro a dégagé quelques pistes de travail, donnant au PCF une visibilité politique auprès des salariés.

Face à la destruction massive d’emplois, touchant particulièrement les sous-traitants et les intérimaires, le PCF se doit de contribuer aux luttes des salariés avec ses propres initiatives et propositions. Il s’agit aussi de construire des initiatives dans les grands bassins d’emplois de la filière dans le cadre des élections régionales.

Si le PCF combat les campagnes de désinformations pseudo écologiques anti-avion ignorant la réalité (7) et l’apport à l’humanité de l’industrie aérospatiale et du transport aérien, il se bat résolument dans les entreprises pour que l’aviation se réinvente afin de relever le défi politique et technologique de réduire considérablement son empreinte écologique avec de nouveaux moteurs, de nouvelles cellules, du roulage aéroportuaire électrique, de nouveaux carburants...

Tout ceci ne sera possible que par l’action, le travail et la coopération de tous les salariés de l’aérien

Jean Claude Pradeau

pour le Collectif Aéro du PCF

1.https://fr.statista.com/statistiques/619008/nombre-emplois-transport-aerien-par-categorie-france/

2. Plan de sauvegarde pour l’emploi

3. Concurrent du Boeing 737 Max..

4. Les avions sortant actuellement de chaine émettent 50 % de moins de gaz à effet de serre et consomment 30 % de kérosène en moins que ceux produits il y a 20 ans.

5. https://www.aerobuzz.fr/culture-aero/le-15-avril-1988-le-tu-155-vole-a-lhydrogene/

6. Donc de nouvelles centrales nucléaires.

7. Malgré sa croissance jusqu’en 2019, le transport aérien mondiale plafonne à 2 % des émissions de CO2 et le transport aérien intérieur français est à 1,4 % des émissions nationales, avec 30 % des Français prenant au moins une fois par an l’avion.

 

 

Publié dans Industries, PCF

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