Histoire. Hors les murs, à l’assaut de toutes les Bastilles par Jérôme Skalski

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Histoire. Hors les murs, à l’assaut de toutes les Bastilles par Jérôme Skalski
Acte de naissance du PC-SFIC et futur PCF, le congrès de Tours du mois de décembre 1920 marque de ses enjeux l’identité du mouvement communiste et ouvrier français.

Nées le 14 juillet 1889 à Paris, sous l’égide de Friedrich Engels, l’Internationale ouvrière et sa promesse de fraternité universelle, fondée sur l’union et l’émancipation des travailleurs de tous les pays, se sont fracassées, un soir de juillet 1914, sur le mur de la guerre.

Il avait pourtant déclaré « la guerre à la guerre » en 1912, au son des cloches de Bâle, à l’occasion du congrès des partis socialistes pour la paix.

Dans un ciel lourd de menaces du fait de l’exacerbation des tensions entre les nations impérialistes européennes depuis le partage colonial de l’Afrique et de l’Asie à la fin du siècle précédent, cet appel avait été suffisant pour les faire reculer, face à la menace du refus de la classe ouvrière européenne de participer au massacre annoncé par les canonnières.

Deux ans plus tard, huit jours après la manifestation pacifiste massive du 27 juillet 1914 organisée par la CGT sur les grands boulevards parisiens et quatre jours après l’assassinat de Jean Jaurès, le 31 juillet 1914, c’est l’ensemble du groupe parlementaire de la SFIO qui vote les crédits de guerre et l’état de siège. La guerre, déclarée la veille par l’Allemagne à la France, rencontrait le front de l’Union sacrée, à laquelle se ralliaient ceux qui étaient les plus farouches opposants au conflit redouté. « Déroute politique et morale allant jusqu’à l’anéantissement », selon les mots de Rosa Luxemburg, les représentants du parti social-démocrate d’Allemagne au Parlement de l’empire de Guillaume II – SPD, parti frère de la SFIO – se rallient également à la guerre et à la Burgfrieden qui se dessine en miroir de l’Union sacrée, de l’autre côté de la ligne bleue des Voges.

Comme en témoigne le nombre de morts dont les noms sont inscrits sur les monuments funéraires du moindre village français, la guerre laissera sur le pays une balafre ­indélébile avec près d’un million et demi de tués et 300 000 victimes civiles. En Allemagne, on dénombrera deux millions de soldats tombés au front et plus de 420 000 victimes ­civiles. De toutes parts, des gueules cassées, des milliers de crimes sans témoin et des blessés innombrables. À l’échelle mondiale, une saignée démographique de près de 20 millions de victimes aggravée par l’épidémie de grippe espagnole, qui se répand sur des populations exsangues.

À l’écart du déchaînement de la fureur guerrière, quelques membres, minoritaires, du mouvement socialiste et ouvrier s’engagent pour une alternative révolutionnaire à la guerre avec la conférence de Zimmerwald, en septembre 1915, la Conférence de Kiental, en avril 1916, et la conférence de Stockholm, en septembre 1917.

Deux révolutions en viendront à bout. La première s’engage sur le territoire du tsar, en février 1917, et rebondit en novembre de la même année sous le nom de révolution d’Octobre. La deuxième, annoncée par les mutineries de Kiel à l’automne 1918, poussera à l’abdication du Kaiser, le 9 novembre 1918, trois jours avant la signature de l’armistice, signé dans la clairière de Rethondes. Il aboutira, après l’écrasement de la révolution spartakiste, en janvier 1919, à la création de la République de Weimar. Mais, c’est partout en Europe que s’élève la « menace » révolutionnaire. En Hongrie, en Irlande, en Italie.

L’année 1919 est forte de ses mobilisations sociales

En France, malgré la domination politique du bloc nationaliste au sortir de la guerre, l’année 1919 est forte de ses mobilisations sociales avec un puissant 1er Mai revendicatif, réunissant un demi-million de manifestants à Paris scandant des slogans révolutionnaires.

Les syndicats se renforcent avec une CGT qui triple ses effectifs d’avant guerre. La SFIO, qui avait vu ses effectifs décliner pendant la guerre, en recense 50 % de plus qu’en 1914, et, malgré la chambre bleu horizon qui s’impose au scrutin législatif de novembre 1919, gagne 300 000 voix de plus qu’en 1914 avec 21 % des suffrages exprimés.

Dans ce contexte, la création de l’Internationale communiste), en mars 1919 à Moscou, est un défi lancé au mouvement révolutionnaire.

Si l’appel au ralliement de la SFIO à l’IC et sa transformation en Parti communiste, qui constitue en filigrane une des principales options proposées au congrès de Tours du 25 au 30 décembre 1920, lui répondent à l’ombre à la fois de la révolution d’Octobre et de la monstrueuse Première Guerre mondiale, l’existence, en France, d’un Parti communiste qui assume son acte de naissance est un témoignage de fidélité non seulement envers soi, mais un fait qui reconduit l’esprit auquel il participe, sortant sans cesse hors les murs de la « vieille maison » réformiste et à l’assaut de toutes les Bastille présentes et à venir, à celui de la Révolution française.

Publié dans Histoire, PCF

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