Quel partenariat Europe-Usa sur le Proche Orient par Francis Wurtz
Huit jours à peine après l’élection de Joe Biden à la présidence des Etats-Unis, l’ Union européenne lui proposait un « nouveau partenariat transatlantique ».
La Présidente de la Commission de Bruxelles, Ursula von der Leyen, précisait même que celui-ci devait couvrir « tous les domaines ». Arrêtons-nous sur l’un d’entre eux : le Proche-Orient.
Durant l’ère Trump, Bruxelles avait -heureusement- marqué son désaccord avec la stratégie révoltante et provocatrice du locataire de la Maison-Blanche à l’égard des Palestiniens. Lorsque, fin janvier 2020, fut publié le pseudo-« Plan de paix » de Washington, calqué sur les exigences coloniales de Netanyahu, le Chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, précisa aussitôt que « l’initiative américaine s’écarte des paramètres internationalement reconnus », rappelant « l’attachement de l’UE à une solution négociée fondée sur la coexistence de deux Etats et sur le tracé de 1967 ». Il précisa : « un État palestinien indépendant, démocratique, d’un seul tenant, souverain et viable ». Il souligna expressément que « l’UE ne reconnaît pas la souveraineté d’Israël sur les territoires occupés depuis 1967 » , évoquant, sans les préciser des « réactions » en cas de « mise en œuvre des étapes vers l’annexion » alors crânement annoncée par Tel Aviv.
Mais, à l’époque, la totale complicité de Trump avec Netanyahu paraissait laisser à l’Europe un faible marge de manœuvre. Il n’en va plus de même aujourd’hui.
Certes, l’arrivée au pouvoir de Biden ne révolutionnera pas la stratégie américaine vis-à-vis de la question palestinienne. Néanmoins, elle créé une occasion de relancer des initiatives internationales pour changer les rapports de force dans la région.
Ainsi, si l’on ne peut que regretter que le nouveau Président américain ait annoncé qu’il ne redéplacerait pas l’ambassade US de Jérusalem, on notera avec intérêt qu’il rouvrira le Consulat général des Etats-Unis à Jérusalem-Est (à destination des Palestiniens) ainsi que la mission palestinienne à Washington; qu’il reprendra le versement de la contribution financière américaine à l’agence des Nations-Unies pour les réfugiés palestiniens (l’UNRWA) et fournira à nouveau une aide économique et humanitaire à l’Autorité palestinienne.
Kamila Harris, la Vice-Présidente, avait déjà souligné l’engagement de la nouvelle administration en faveur de la solution à deux Etats et assuré que celle-ci « s’opposera aux actions unilatérales israéliennes qui sapent la solution à deux Etats » et notamment « à l’annexion et à l’expansion des colonies ». De quoi ouvrir un sérieux espace de discussions !
« Attendons pour voir : nous jugerons la nouvelle équipe sur ses actes », diront certains.
Non, n’attendons pas ! Faisons au contraire monter l’exigence d’un engagement immédiat des dirigeants européens -à commencer par le Chef d’Etat français- : celui de profiter d’une « fenêtre d’opportunité » (avant qu’elle ne risque de se refermer) en mettant sur la table de leur « nouveau partenariat transatlantique » un projet concret visant la restauration effective du droit international au Proche-Orient.
Francis Wurtz
Article publié dans l'Humanité Dimanche