Le plus vieux désert du monde meurt pour nos portables et les batteries des voitures électriques
Si la voiture électrique est vécue comme un apport positif à la lutte pour le climat et contre les émissions de gaz polluants en France et en Europe, elle est par contre une vraie catastrophe écologique pour d'autres régions du monde. Comme pour le plus vieux désert du monde, le désert d'Atacama au Chili qui détient 40% des réserves mondiales de lithium l’ingrédient principal utilisé pour... les technologies vertes ! Au premier rang desquelles les batteries pour recharger les voitures électriques et hybrides.
Le désert de sel Atacama est un trésor naturel, national et mondial. Il est aussi le réservoir de la plus ancienne collection de météorites, certaines âgées de plus de 2 millions d’années. Les voitures électriques et hybrides ont donné un immense boom au secteur déjà bien sollicité par les demandes pour fabriquer les batteries des téléphones portables et des ordinateurs. C’est une véritable ruée vers l’or qui s’est déclenchée dans ce « triangle du lithium », dans les déserts de sel de l’Argentine du Chili et de la Bolivie. Mais c’est bien le Chili qui reste leader avec des prix très attractifs dus à des conditions d’extraction optimales.
Pour extraire le lithium, le processus consiste à évaporer l’eau où il est contenu. Les mines assèchent donc le désert. Ce sont déjà 430 milliards de litres d’eau qui ont été perdus sur le seul plateau d’Atacama. Et comme le dit le sous-secrétaire de l’extraction minière Ricardo Irarrazabal Sanchez : « L’extraction minière du lithium ne fait que commencer ». Il assure que le dialogue avec les communautés locales est essentiel, et que le gouvernement mène actuellement des études pour évaluer d’autres déserts de sels où étendre l’exploitation du lithium « pour préserver les lagons de Atacama ».
Les mines d’exploitation de lithium sont gérées par des entreprises privées qui payent un loyer au gouvernement pour l’exploitation des mines. Une partie des profits est reversée sous forme de taxes qui doivent être réinvesties dans des infrastructures à Santiago. Pas de souci à se faire donc quant au partage des profits. Pour les animaux comme pour les peuples qui y vivent, cela signifie la condamnation à disparaître ou à migrer.
Des militants ont organisé des marches pour éveiller l’attention des autorités. Ce que ces habitants du désert dénoncent, ce n’est pas seulement la destruction d’un territoire, c’est aussi la confiscation de leur droit à participer à l’avenir de leurs enfants, sous le prétexte d’un grand projet national mené par « ceux qui savent » ce qui est bon pour eux.
Ils disent : « Nous voulons aussi développer. Mais nous voulons en faire partie. » Ils ont fini par obtenir un arrêt de la cour environnementale à Antofagasta obligeant la principale entreprise d’exploitation et leader mondiale, SQM Sociedad Química y Minera de Chile de freiner ses ambitions d’expansion.
Le combat est loin d’être gagné, et à ce rythme, le désert de sel disparaîtra, entraînant dans sa destruction des effets aussi graves que ceux de la destruction de la forêt amazonienne.
Nous qui utilisons des ordinateurs, des téléphones portables, devant les dégâts causés par l’extraction d’énergies fossiles, nous songeons peut-être à acheter des voitures électriques. La frontière entre les bons et les méchants, entre les exploitants destructeurs de l’environnement et ses défenseurs, n’est pas aussi claire que ce qu’on voudrait bien croire.
À nous d’exiger de nos gouvernements et des entreprises à qui nous achetons des produits, d’avoir une éthique de production. Et pourtant... avec 2 milliards d’individus de plus en 2050, qui seront nés dans le monde des nouvelles technologies, comment imaginer que nous arriverons à limiter la production de lithium ?
Devons-nous en tirer la conclusion que les technologies vertes sont elles une arnaque de plus ? Non. Simplement que si la seule solution que nous trouvons est de remplacer des technologies fossiles par d’autres, sans changer la manière dont nous les utilisons, la quantité de ce que nous produisons et consommons, nous ne ferons que déplacer le problème. Et l'obligation d'accentuer la recherche vers d'autres technologies.