Le dépôt de bilan de Greensill met en danger le devenir de 3 filières industrielles stratégiques !

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Le dépôt de bilan de Greensill met en danger le devenir de 3 filières industrielles stratégiques !

Le 8 mars dernier, la société financière Greensill déposait le bilan à Londres. Société d’affacturage, Greensill est notamment un partenaire financier primordial pour le groupe Liberty, filiale du conglomérat indien GFG Alliance.

Il se trouve que Liberty a racheté depuis quelques années des sites industriels français, et pas des moindres :

  • Les fonderies du Poitou, ainsi que celle de Châteauroux (dernier fabricant de jantes aluminium en France), et la carrosserie Durisotti (59) dans le secteur automobile. 
  • Aluminium Dunkerque, ex Péchiney.
  • L’ensemble Ascoval (59) / Hayange (57), tout récemment, dans la sidérurgie.

Autrement dit, l’avenir à très court terme de ces sites est hypothéqué par le risque d’implosion de leur propriétaire, totalement fragilisé sur le plan financier. Près de 2500 emplois directs sont menacés !

Le ministre de l’économie a déclaré, le 9 mars : « L'Etat sera derrière les salariés des sites industriels français comme Ascoval, concernés indirectement par le dépôt de bilan lundi de la société britannique de financement Greensill ». Il se trouve, pour la petite histoire, que le ministère de l’économie a appuyé la reprise de ces sites industriels par le groupe GFG.

Et pourtant, la CGT, comme d’autres organisations syndicales en France et en Europe, alerte depuis plusieurs années les pouvoirs publics quant au mode d’ascension de Liberty dans l’industrie, dans des secteurs majeurs tels l’acier ou l’aluminium.

Tous les observateurs peuvent en effet constater cette boulimie d’acquisitions, accompagnées à chaque fois de promesses d’investissements substantiels. Rappelons qu’en Europe, Liberty a repris certains sites d’ArcelorMittal, en contrepartie du rachat par ce dernier du groupe Ilva en Italie, et afin de respecter les règles européennes en matière de concurrence.

Boulimie d’acquisitions donc, fortement financées par l’emprunt, et avec une réelle opacité quant à la structure financière de la multinationale. Le fonctionnement de Liberty, avec Greensill, c’est ce qu’on appelle dans le jargon économique du LBO (financement par l’emprunt, en ponctionnant la trésorerie des sites rachetés pour rembourser).

A titre d’exemple, c’est la technique du fond d’investissement américain Apollo, lequel a conduit Ascométal (aciers spéciaux français), en 2014, au redressement judiciaire. Un fond toujours actif dans l’industrie française, d’ailleurs, il vient de s’insérer dans le capital de Vallourec, avec l’aval de l’Etat. Bref, le gouvernement ne peut pas aujourd’hui faire comme s’il tombait des nues, il savait, il sait.

Les 3 filières en jeu, l’acier, l’aluminium et le secteur automobile sont des filières décrétées stratégiques pour l’industrie française. Des rapports parlementaires en attestent. Les deux matériaux sont décrétés incontournables pour la transition de notre industrie, avec des besoins croissants.

Preuve en est : les carnets de commandes pour Ascoval/Hayange, comme pour Aluminium Dunkerque, sont très bien orientés actuellement. Il peut en être de même pour les fonderies et la fabrication de jantes, dès lors que l’Etat contraint les grands donneurs d’ordres tels Renault ou PSA, en contrepartie des aides publiques, à se fournir en France.

Ces derniers mois, on entend très souvent le gouvernement promettre la réindustrialisation de la France et la relocalisation d’activités.

Pour la CGT, face aux enjeux d’équilibre industriel, et s’agissant de garantir l’activité des sites cités plus haut et le maintien des emplois, le gouvernement est ainsi placé face à une obligation de résultat. D’autant plus quand on entend le groupe GFG parler de ralentissement de cadences, le temps de trouver des solutions !

Bruno Le Maire vient d’annoncer un prêt de 20 millions d’euros à Ascoval/Hayange pour sécuriser leur fond de roulement, étant donné la carence actuelle de Liberty. Rappelons que Liberty a dernièrement, pour chaque entité, sollicité un PGE (Prêt Garanti par l’Etat).

Seul celui pour la fonderie alu du Poitou a été effectivement versé (18 millions d’euros), mais transféré immédiatement à la banque Greensill, sur ordre de la maison mère GFG Envolés donc, à ce jour, les 18 millions d’argent public !

Nous sommes véritablement ici dans une dérive, la financiarisation de l’Industrie, que nous dénonçons depuis des années. Mais aussi dans le fiasco des aides publiques sans contreparties. Il est urgent que les pouvoirs publics reprennent la main, par la piste de prises de participations majoritaires au capital, voire, dans les cas d’urgence comme celui-ci, de nationalisation, ne serait-ce que transitoire, afin de pérenniser l’activité et assoir un véritable projet industriel.

La question de la gouvernance de ces piliers de l’industrie est évidemment posée.

La nationalisation transitoire a par exemple été actionnée en 2017 pour STX (les chantiers navals de St Nazaire), afin de garantir une continuité d’activité. Décision prise par Bruno Le Maire à l’époque. Au-delà des paroles du ministre de l’économie, qui se veulent rassurantes, il faut aujourd’hui passer aux actes !

Montreuil, le 07 avril 2021

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