Le mépris, le voilà.
Comment ne pas se désoler quand on voit s'étaler à longueur d'interviews dans les média et de parades dans les hôpitaux la même rhétorique du mépris à l'encontre de notre profession pour défendre un dispositif vitrine qui masque un autre mépris, celui des patients?
Ce discours est insupportable parce qu'il laisse entendre que le cœur de notre révolte est notre rémunération, nous ramenant à ce mythique psychologue qui gagnerait tellement bien sa vie en proposant des tarifs indécents.
Faut-il encore rappeler, comme l'a démontré il y a quelques jours le SNP, que les psychologues libéraux sont dans la fourchette basse des professions libérales en ce qui concerne leur rémunération?
Ce discours est insupportable parce qu'il nous place, nous psychologues, en rivalité permanente avec les médecins en laissant entendre que dans ce dispositif, les psychologues gagnent presque autant que les médecins et qu'il ne faudrait trop abuser, nous ne sommes tout de même pas des médecins!
Et voilà comment en comparant l'incomparable de deux réalités professionnelles distinctes, - ce qui relève d'un "acte" qui peut se faire en 12, 15, 20 min, et la prise en charge psychothérapeutique qui comprend la séance qui dure au minimum 45 min, mais également tout le processus d'élaboration de l'après-séance, notes et bilans compris - on créé de toute pièce une polarisation et une bataille de légitimité entre deux corps professionnels qui savent travailler en complementarité et en bonne intelligence et ce au bénéfice des patients.
Mais le plus indécent ce ne sont pas ces mauvais débats qui font des psychologues de parfaits hommes de paille, ces nantis ne voulant pas soutenir l'effort de solidarité.
Non. Le plus triste, c'est ce cynisme absolu qui ne dit pas que ce dispositif est une manière de faire porter sur les libéraux la responsabilité du désengagement total de l'état du système de santé public. Fort heureusement, le chef de l'Etat et son ministre de la santé nous l'ont assuré, nous pourrons ne pas nous conventionner, au bénéfice de ceux, jeunes diplômés en tête, qui peinent à bien vivre de leur métier. Après avoir fustigé les nantis, voici venir les rescapés, sauvés de la misère par l'uberisation du soin psychique. On n'est plus à une contradiction près.
On nous répétera, ad nauseam que c'est mieux que rien. S'il y a bien un domaine dans lequel le mieux est l'ennemi du bien, c'est bien celui du soin. Surtout quand on ne parle plus de qualité de prise en charge, ni de respect du patient, de l'éthique et de la déontologie, ce que les psychologues défendent farouchement, parce qu'au fond c'est bien cela qui compte. Surtout quand le projet de financement le plus important de l'histoire de l'assurance maladie est en fait un plan de séduction électorale qui manque clairement d'ambition et qui n'est pas à la hauteur du moment ni de l'urgence.
Les patients méritent mieux, les psychologues aussi.
Lionel Camalet
Psychologie clinicien et psychothérapeute