La dérèglementation et le marché libre de l'énergie sont les causes premières de la crise actuelle dans l'énergie
Le chantage des industriels a commencé pour tenter d'obtenir des prix d'électricité qui ne viennent pas réduire leurs profits. Ils menacent de recourir à des baisses de production voire des arrêts d'usines en France début 2022, s'ils n'obtiennent pas satisfaction.
Ils justifient leur attitude scandaleuse par la hausse des prix de l'énergie et surtout de l'allocation d'électricité à prix garanti qu'ils ont reçue du système de régulation Arenh. Le mécanisme baptisé Arenh (pour "accès régulé à l'électricité nucléaire historique") permet depuis 2011 aux fournisseurs alternatifs privés et aux industriels dits "électro-intensifs" d'acheter de l'électricité nucléaire d'EDF à un prix fixe très modeste, de 42 euros par MWh. Il faut avoir en tête que ce prix de vente imposé à EDF est en dessous de son coût de production, conduisant EDF à être en déficit et endettée.
Alors, ils réclament un Etat providence pour eux et leurs affaires, mais ils oublient que ce prix, basé sur les coûts de production du nucléaire en France, est très avantageux par rapport aux cours de l'électricité sur le marché spot (comptant), qui a oscillé entre 200 et 300 euros par MWh ces dernières semaines, et même par rapport au marché à terme 2022 -celui sur lequel s'approvisionnent les industriels lorsqu'ils ne peuvent plus bénéficier de prix régulés- qui cotait 170 euros par MWh jeudi.
Mercredi soir, les gros consommateurs d'électricité, fournisseurs alternatifs et industriels, ont appris qu'ils ne recevraient que 62,37% de leurs demandes d'électricité bon marché en 2022, le plafond disponible de l'Arenh étant fixé à 100 TWh. Leurs demandes portaient sur 160,36 TWh pour l'année. "C'est le taux d'écrêtement le plus important jamais connu" a noté l'Union des industries utilisatrices d'électricité (Uniden), dans laquelle on retrouve notamment sidérurgistes, chimistes ou producteurs d'engrais, gros utilisateurs d'électricité.
"Concrètement cela signifie que les industriels électro-intensifs situés en France vont devoir compléter une partie importante de leur approvisionnement sur le marché" dit libre" souligne l'Uniden. Bien sur, s'il y a hausse du coût de l'énergie, il devront prendre ce surcoût sur leur marge, donc leurs profits !
On ne peut quand même pas venter la loi du marché et dans le même temps la rejeter quand elle n'est pas bonne pour ses intérêts personnels !
C'est cela qu'ils pratiquent ! Avec un chantage inadmissible en envisageant sur un certain nombre de sites d'adapter leur production en conséquence, jusqu'à l'arrêt complet pour certains profils comme le souligne l'Uniden.
Baisse de la production
Déjà plusieurs ont procédé ces dernières semaines à des baisses de production comme l'usine de zinc Nyrstar à Auby (Nord), l'aciérie électrique de LME Beltrame près de Valenciennes (Nord), l'électrolyse de chlore de Kem One à Fos-sur-mer. Sans parler d'Ascoval qui produit de l'acier décarboné, passée à deux doigts de délocaliser une partie de sa production en Allemagne, où l'acier, produit à partir de charbon, coûte moins cher qu'en France, alors qu'il émet beaucoup de CO2.
La bataille est donc lancée. Auront-ils gain de cause ? L'Etat prendra t-il ses responsabilités en restant ferme et en exigeant pour que ces entreprises prennent sur leurs profits, sur les dividendes, les incidences de la hausse des prix de l'énergie.
Les fournisseurs alternatifs privés d'électricité avaient demandé à l'Etat de relever cette année le plafond de l'Arenh à 150 TWh cette année, la situation d'EDF est le cadet de leur souci, mais le gouvernement n'a pas donné suite sous prétexte que la Commission européenne y serait opposée.
Il faut rappeler que l'Arenh a été créé et accepté par la Commission européenne pour permettre à des fournisseurs alternatifs privés d'électricité d'accéder à de l'électricité nucléaire à des prix bas, en dessous du prix de revient, pour faire émerger une concurrence à l'efficacité d'EDF. Une fois encore, démonstration est apportée que cette logique de la concurrence guidée par le profit privé maximum et la dérèglementation du service public est totalement perverse, inefficace et destructrice de nos atouts nationaux.
Il est urgent de changer ce mode de fonctionnement de l'économie et de la société et de revenir pour tout ce qui est bien commun comme l'électricité à la gestion publique, c'est pourquoi Fabien Roussel propose la création d'un Pôle public de l'énergie avec la renationalisation d'EDF.