Face à la réforme du RSA ou le travail gratuit instauré par Macron... agissons pour une Sécurité d'Emploi et de Formation !

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

La mesure est dans les tuyaux. La préfiguration de France Travail, futur nom de Pôle emploi, l’a confirmé : pour percevoir le RSA, ses allocataires devront réaliser 15 à 20 heures « d’activité » par semaine. 18 départements ont commencé à l’expérimenter, mais on sait d’ores et déjà que la mesure sera généralisée.

 

« Avec cette réforme, le gouvernement glisse de plus en plus d’un droit à l’emploi vers une obligation de travailler », avait mis en garde la CGT en janvier. « A l’issue de ce rapport, on n’en [sait] guère plus sur le contenu réel de l’offre de services autour des 15 à 20 heures d’activité », a réagi l’association ATD Quart Monde, favorable, comme les autres associations de lutte contre la pauvreté, à un revenu minimal inconditionnel.

 

Concrètement, il s’agira, selon Thibaut Guilluy, auteur du rapport, « d’immersions d’entreprises [sic], de formation, passer le permis de conduire, faire du bénévolat dans une association… tout ce qui contribue à faire en sorte que la personne reprenne confiance en elle, qu’elle se forme et qu’elle retrouve un emploi ». La France est en train de franchir un cap supplémentaire vers le workfare, ces programmes états-uniens qui considèrent que les allocataires d’une prestation sociale aptes au travail doivent travailler pour percevoir leur allocation ?

Le département de Seine-Saint-Denis avait d’abord signé pour l’expérimentation. Il s’en est retiré fin mars. « La goutte d’eau a été le discours présidentiel [du 22 mars], quand Emmanuel Macron a déclaré qu’il souhaitait "aller chercher ces bénéficiaires et les responsabiliser". Pour nous, c’est inacceptable, car le RSA est un droit social fondamental », a souligné le président du conseil départemental, Stéphane Troussel.

 

L’automaticité de la sanction serait un coup de tonnerre. En l’état le flou règne, la réforme constitue surtout un pas supplémentaire vers une tendance de long terme, celle de l’injonction à l’emploi faite aux allocataires du RSA. Dès leur mise en place, dans les années 1990, les politiques d’insertion mettent l’accent sur la responsabilité individuelle. « Très vite, on est passé du droit à un revenu minimal garanti par la collectivité et inscrit au préambule de la Constitution de 1946 à une incitation à travailler », résume l’économiste Anne Eydoux.

 

Au cours des années 1990 puis 2000, les différents minima sociaux ont été assortis de telles incitations. Depuis la transformation du RMI (revenu minimum d’insertion) en RSA (revenu de solidarité active), en 2009, cette prestation est complexe à obtenir, en particulier lorsqu’elle se combine à de petits revenus.

 

Son attribution fait déjà l’objet de contrôles, et de sanctions (réduction ou suspension) en cas de non-respect des démarches d’insertion professionnelle ou sociale. Certains départements sont allés plus loin. En 2016, le Haut-Rhin a ainsi voté l’obligation de sept heures de bénévolat par semaine pour les allocataires du RSA. Très contesté, le principe a finalement été validé par la justice au bout de quatre ans.

 

Problème : la pression mise aux allocataires ne produit pas les effets escomptés, comme l’a montré une étude récente1. « Les contrôles des bénéficiaires du RSA ne sont pas très efficaces », explique Yannick L’Horty, l’un des co-auteurs de l’étude. L’envoi de courriers rappelant aux allocataires leurs obligations sous menace de suspension ou de radiation de leurs droits n’a pas beaucoup d’effets sur le respect de leur contrat.

 

« Ces messages d’avertissement conduisent en réalité à des sorties du RSA, sans que l’on sache si les personnes concernées ont retrouvé un emploi. S’il n’est pas exclu que ce soit le cas pour certains profils moins en difficulté, pour d’autres, la radiation les oblige à se réinscrire et donc à reprendre de zéro leur parcours d’insertion », poursuit le chercheur.

 

Nombre d’allocataires sont demandeurs d’un meilleur accompagnement. Mais il n’est pas nécessaire de l’assortir d’une obligation d’activité. D’autant que « les politiques d’insertion agissent à la marge. Ce qui a vraiment un impact sur le chômage, ce sont les créations d’emplois », explique Anne Eydoux.

Un discours difficilement audible à l’heure où les employeurs se plaignent de difficultés de recrutement. Dans son rapport, Thibaut Guilluy pointe « un paradoxe de plus en plus difficilement compréhensible par les citoyens » : d’un côté, de nombreuses personnes dépourvues d’emploi, de l’autre, des entreprises qui peinent à recruter. Et de citer le chiffre de trois millions d’intentions d’embauche en 2023. Issu de l’enquête de Pôle emploi, ce chiffre ne peut toutefois pas être mis en regard des 2,8 millions de chômeurs de catégorie A et du 1,8 million de foyers percevant le RSA. Les intentions d’embauche ne se traduisent pas en créations nettes d’emploi.

 

En 2022, trois millions d’embauches ont été déclarées, et 300 000 emplois salariés dans le privé ont été créés. Les emplois à pourvoir sont soit qualifiés (couvreurs-zingueurs qualifiés, pharmaciens,…) soit correspondent à des conditions de travail difficiles (cuisinier, serveur, aide ménagère, manutentionnaire…). L’appariement entre chômeurs de longue durée et allocataire du RSA d’un côté, et emplois non pourvus de l’autre n’a rien d’une évidence.

 

Aujourd’hui, le RSA constitue un socle de revenus pour 1,8 million de foyers, soit près de 4 millions de personnes avec les conjoints et enfants, pour une dépense publique de 15 milliards d’euros (prime d’activité et accompagnement compris). Cela représente 7 000 euros par ménage et par an, « ce qui en fait l’une des aides publiques les moins coûteuses par rapport à son impact social », rappelaient les chercheurs Yannick L’Horty, Rémi Le Gall et Sylvain Chareyron en 20222Pour une allocation d’un montant qui reste très insuffisant pour vivre : de 607 euros pour une personne seule à 1 519 euros pour un couple avec trois enfants. Et avec un taux de non recours de plus de 30 %.

 

Pour remédier à cette situation, il faudrait créer des emplois décents, non qualifiés et qualifiés, de proximité et engager un vaste plan de formation. Cela impliquerait de dépenser beaucoup plus. Et pas dans la direction prise par le gouvernement. Si on compare les 15 milliards que coûte le RSA et les 320 à 350 milliards (1) que coûte les - millions de chômeurs et de précarisés, il faut changer radicalement de politique économique et sociale en engageant une réelle et sérieuse politique de l'emploi et de formation comme le précise la base commune adoptée au 39ème congrès des communistes à Marseille.

 

Ainsi, ils proposent de construire un système permettant de travailler toutes et tous, une
sécurité de l’emploi et de la formation dont l’ambition est d’éradiquer le chômage. Dès la sortie du système scolaire, nous proposons que chacune et chacun soit affilié·e à un nouveau service public de l’emploi et de la formation lui permettant d’alterner, tout au long de sa vie, périodes d’emplois et périodes de formation dans une sécurité de revenu et de droits. Il s’agit d’un processus révolutionnaire conduisant à l’éradication du chômage, au dépassement du marché du travail
capitaliste, à une mobilité choisie pour chacune et chacun et à un progrès culturel considérable par l’accès permanent et volontaire des salarié·es aux savoirs et aux connaissances.
 

Les communistes agissent pour un nouveau développement d’une Sécurité sociale du 21e siècle, répondant aux besoins humains, prenant en charge les soins à 100 % y compris pour l’autonomie, en lien avec le développement des services publics, revenant à une politique familiale universelle et garantissant une retraite de haut niveau.
 

Le projet de société des communistes, à travers la Sécurité sociale du 21e siècle, impose de mettre en œuvre les conditions d’une efficacité sociale nouvelle, en s’appuyant sur une dépense publique et sociale massive.

 

Cela est cohérent avec l'engagement des communistes dans le mouvement social contre la retraite à 64 ans. Ils portent l’abrogation des réformes Balladur, Fillon et Touraine. Leur projet est celui d’une retraite à taux plein à 60 ans, pour toutes et tous, intégrant la prise en compte des années d’études et de formation, du nombre d’enfants, de l’inactivité subie, avec des droits au départ anticipé en cas de pénibilité ou de carrières longues. Aucune pension ne doit être inférieure au smic revendiqué, pour les secteurs public et privé.
 

Outre l’exigence de suppression de la CSG sur les salaires et les pensions, nos propositions de financement reposent sur deux innovations : la création d’une cotisation sur les revenus financiers des entreprises ; une modulation à la hausse des cotisations sociales pour les entreprises qui attaquent l’emploi, les salaires, la formation et l’environnement. Au-delà, c’est le travail lui-même et notre mode de production que les communistes veulent changer.

 

Notes :

(1) https://travail-emploi.gouv.fr/publications/Revue_Travail-et-Emploi/pdf/40_2998.pdf

 

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