Macron se la joue président de l'Europe ...

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

Alors que Valérie Hayer, tête de liste Renaissance aux européennes, est à la peine, Macron a livré un discours-fleuve sur le cap qu’il voudrait donner à l’UE, défendant la souveraineté des 27 pays membres face au repli national. Ses opposants dénoncent un meeting déguisé qui devrait être décompté du temps de parole de la Macronie.

 

Renaissance a une nouvelle tête de liste officieuse pour les européennes, elle s’appelle Emmanuel Macron. Ce jeudi 25 avril, depuis l’université de la Sorbonne (Paris), il a cherché à donner le cap que sa candidate, Valérie Hayer, peine à imprimer. Une intervention-fleuve de 2 heures, intitulée « Une Europe puissance », qui intervient 7 ans après son discours de la Sorbonne du 26 septembre 2017, où il plaidait, déjà, pour consolider la souveraineté européenne face à la montée des nationalismes.

 

Son propos a très vite pris des allures de discours de politique générale à l’échelle du continent. Macron se rêve capitaine d’une Europe dont il se vante d’avoir « visité chacune des capitales » durant son premier quinquennat. « Nous avons jeté les bases d’une souveraineté industrielle et technologique européenne. Nous avons su au moment du Covid bâtir un plan de 800 milliards d’euros. Ce pas de l’endettement commun témoigne du choix d’une Europe unie », souligne-t-il.

 

Fortes de ce bilan, pour le chef de l’État, « les idées européennes ont gagné le combat gramscien. Les nationalistes n’osent plus dire qu’il faudrait sortir de l’euro ou de l’Europe. En revanche, ils donnent du “oui, mais”. Ils veulent rester dans l’immeuble mais ne plus payer le loyer ».

 

Sur les troupes en Ukraine, il persiste et signe

 

Les nationalistes caracolent en tête des sondages. Le RN, moins eurosceptique qu’il y a cinq ans, est crédité de plus de 30 % des voix. Distancé dans un scrutin qui tourne surtout autour de considérations nationales, Macron entendait donc à la Sorbonne faire de l’UE un horizon indissociable de celui de la France. « Notre Europe est mortelle, elle peut mourir d’elle-même. Cela dépend des choix que nous ferons maintenant. » Il plaide dans la foulée pour une Europe réindustrialisée, leader économique dans des domaines comme les batteries, l’hydrogène, l’intelligence artificielle, l’informatique quantique, l’espace et les nouvelles énergies. « Cette ère où l’Europe achetait son énergie et son engrais à la Russie, faisait produire en Chine et déléguait sa sécurité aux États-Unis est révolue », proclame-t-il.

 

Mais il a beau répéter comme un mantra le mot de « souveraineté », pas question pour autant de toucher aux traités de libre-échange, qui organisent la concurrence déloyale. L’ex-banquier d’affaires se dit favorable aux « clauses miroirs », mais il balaie d’un revers les critiques sur le Ceta, ce traité qui n’impose aucune norme de rééquilibrage aux produits canadiens, et taxe la réouverture du débat autour de l’accord grâce aux sénateurs PCF de « démagogique ».

 

Concernant l’agriculture, il s’agit surtout selon lui de « mettre fin à l’Europe compliquée » : « La colère des agriculteurs n’est pas une colère contre l’Europe mais contre les normes aberrantes, la sur-réglementation. On a besoin de continuer à importer et à exporter, mais on a aussi besoin de ne pas dépendre. »

 

L’Europe esquissée par Macron est un continent qui rehausse son budget de la défense et sort « de ce réveil trop long face au réarmement généralisé du monde ». Il a à nouveau plaidé pour une défense européenne commune, avec la création d’une académie militaire européenne, et un éventuel « bouclier du ciel » à l’échelle des Vingt-Sept, pour se protéger des missiles russes. « Nous ne sommes pas armés face aux bouleversements du monde ! » s’inquiète celui qui avait évoqué un potentiel envoi de troupes en Ukraine. « J’assume d’avoir réintroduit une ambiguïté stratégique, confirme-t-il. La Russie, elle, n’explique plus ses limites. Si nous pensons que l’Ukraine est la clé de notre sécurité, à nous, Européens, alors avons-nous des limites ? Je ne crois pas. »

 

Une manière pour Emmanuel Macron de réaffirmer au sein de la défense européenne la centralité de la France, seule puissance nucléaire des Vingt-Sept depuis le Brexit.

 

Une transition écologique avec « en même temps » moins de normes environnementales

 

Il affirme aussi sa fermeté face à l’immigration. Emmanuel Macron a salué le pacte sur la migration et l’asile, tout en taclant de manière implicite le choix du Royaume-Uni d’envoyer ses migrants au Rwanda : « C’est la géopolitique du cynisme. »

 

L’intervention a le mérite de clarifier le cap macroniste en Europe, alors que la liste Renaissance n’a toujours pas de programme : maintien du cap libéral, militarisme, montée sécuritaire aux frontières, transition écologique mais avec le moins de normes possibles et uniquement si elle s’ajuste aux besoins de la croissance.

 

Les ministres ont pris des notes, tandis que le locataire de l’Élysée prône un « pacte de prospérité » et la création d’un « marché européen de l’investissement et de l’épargne, qui permettrait de remettre de la culture du risque dans la gestion de l’épargne ». Culture que l’UE aurait perdue depuis la crise des subprimes de 2008 – tout un programme.

 

« C’est un meeting pour Valérie Hayer, avec un peu d’honnêteté politique, cela devrait être décompté de son temps de parole », tacle la tête de liste PCF Léon Deffontaines. « Les Républicains », quant à eux, ont saisi la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) ainsi que l’Arcom pour que le discours soit en effet décompté de la campagne de Renaissance.

 

« Macron entretient des illusions dangereuses, comme sur l’adhésion de l’Ukraine à l’UE, qui entraînerait un énorme dumping social. Il défend une Europe des profiteurs, de la guerre, du libre-échange et de l’austérité », a réagi la candidate FI Manon Aubry. Et l’écologiste Marie Toussaint regrette que le « dérèglement climatique soit le grand absent d’un discours lunaire ».

 

Une harangue d’autant plus mal accueillie par les oppositions qu’elle s’est tenue le jour même où le Parlement européen s’est réuni pour sa dernière session plénière avant le scrutin du 9 juin. Plusieurs textes importants ont été mis au vote, parmi lesquels une révision de la politique agricole commune, qui se retrouve déplumée de plusieurs règles environnementales.

 

De quoi réjouir les députés Renaissance qui ont voté en ce sens et avaient donc une « bonne » raison pour sécher le discours du patron.

 

Sources Cyprien Caddeo

https://www.humanite.fr/politique/emmanuel-macron/a-la-sorbonne-emmanuel-macron-se-la-joue-president-de-leurope

Publié dans Europe, Elections

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