Ils se disent abasourdis par la dissolution de l'Assemblée annoncée dimanche soir par Macron
"Le chef va parler et il va annoncer quelque chose de costaud. La dissolution est dans l'air." Ce proche de Macron glisse cette confidence à peine croyable. Le président de la République pourrait dissoudre l'Assemblée nationale, en réaction aux résultats des élections européennes. Tombés une trentaine de minutes plus tôt, comme prévu depuis plusieurs semaines, ils sont très mauvais pour le camp présidentiel alors que l'extrême droite réalise 31,36% tandis que la liste conduite par Valérie Hayer termine à 14,6%. Une catastrophe pour la majorité présidentielle.
"C'est la veillée funèbre", glisse un macroniste, à cette annonce présent à la Mutualité pour suivre la soirée électorale. "C'est une claque, une baffe et clairement une sanction de la politique de la majorité", soupire un autre. La prise de parole de Macron, agite les militants et les soutiens du chef de l'Etat. "Je ne saurais, à l'issue de cette journée, faire comme si de rien n'était (...). J'ai entendu votre message, vos préoccupations, et je ne les laisserai pas sans réponse", assure-t-il, avant d'annoncer la dissolution de l'Assemblée et des législatives anticipées, les dimanches 30 juin et 7 juillet.
Dans le camp présidentiel, le choc est immense. "C'est une complète surprise", livre une candidate de la liste Hayer, qui refuse d'en dire davantage. "Je ne m'y attendais pas, personne ne s'y attendait", confie un conseiller ministériel. Le délai annoncé pour faire campagne laisse plusieurs macronistes dubitatifs. "Personne ne comprend comment réinstaller un récit en trois semaines", affirme l'un d'eux, Les députés Renaissance sont aussi sous le coup de l'annonce. "Je ne comprends pas. Pour le moment, je suis totalement abasourdi", glisse le député Renaissance de Moselle, Ludovic Mendes.
Mais il fallait s'y attendre, considère une députée Renaissance des Yvelines. Nous savions que ce n'était qu'une question de temps" sans majorité absolue à l'Assemblée. Depuis le début de la mandature, les rumeurs de dissolution ont été parfois tenaces. L'option n'était pourtant pas sur la table des macronistes, jusqu'à ce dimanche 9 juin donc. "Je pense que le président ne fera pas de dissolution avant 2027. Il ne veut pas être celui qui aura permis au RN d'accéder au pouvoir", confiait, le 22 avril, un cadre de la majorité.
Trois jours plus tard, Macron semblait écarter l'hypothèse alors qu'il était interrogé sur l'organisation d'un débat avec Marine Le Pen. La présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale posait comme condition une dissolution ou la démission du chef de l'Etat en cas de défaite aux européennes. "Bah bien sûr", avait-il ironisé au micro de BFMTV.
Que s'est-il donc passé pour que la menace si souvent brandie de la dissolution soit mise à exécution ? "Il faut entendre le message passé par les Français, justifie la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot. Il ne faut pas se tromper d'élection, mais le score du RN est historique, il faut l'entendre et redonner la parole aux Français."
Le risque pris par Emmanuel Macron est pourtant immense. Fort de ses 31,5%, le RN peut espérer l'emporter dans les urnes le 7 juillet. "Nous sommes prêts à exercer le pouvoir", affirme le président du RN. Macron tente "quelque chose d'extrêmement risqué. Selon toute vraisemblance, le Rassemblement national, dans la foulée des européennes, peut avoir une majorité à l'Assemblée nationale et pourquoi pas une majorité absolue", estime la directrice générale de l'institut de sondages Odoxa.
Passée la surprise, d'autres essayent de défendre la décision présidentielle. "Qu'est-ce qu'il aurait pu faire ? Il y a un message très clair qui a été passé. Il fallait aller plus loin qu'un remaniement". "Il n'allait pas démissionner, remanier c'est trop faible et donc la dissolution était sur la table", embraye un proche d'Emmanuel Macron.
D'autres affirment qu'il valait mieux prendre les devants au regard des turbulences qui s'annonçaient après l'été. "Il vaut mieux créer l'électrochoc maintenant, plutôt qu'en étant contraint de le faire avec une motion de censure qui passe à l'automne", analyse un conseiller ministériel. Les Républicains ont brandi, depuis plusieurs semaines, la menace d'une motion de censure, lors des discussions sur le budget, qui aurait pu coaliser les oppositions.
Les partisans de Macron ont trois petites semaines pour espérer contrer l'extrême droite. La majorité présidentielle "donnera l'investiture" aux députés sortants "faisant partie du champ républicain" et "qui souhaitent s'investir sur un projet clair pour le pays", a annoncé secrétaire général de Renaissance, dans une déclaration à l'AFP. Cela suffira-t-il ? "C'est la panique générale, mais on va repartir au combat, c'est comme ça", grince des dents un probable candidat Renaissance. "Je suis rincée, j'y vais en pilote automatique, mais on y va, et on ne lâchera rien".
Sources : France TV Info