Point de vue de Laurent Brun sur l'affaire Doliprane (Sanofi)

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

Point de vue de Laurent Brun sur l'affaire Doliprane (Sanofi)
 
Ça faisait longtemps que je n’avais pas fouillé un sujet donc petit dossier DOLIPRANE : un nouveau scandale capitaliste dans une macronie complice !
 
 
Ce 21 octobre sanofi a officialisé la vente de 50% de sa filiale Opella à un fond d’investissement américain (CD&R) pour un montant probable de 8 milliards d’euros. L’entreprise produit le Doliprane sur 2 sites industriels : Lisieux dans le Calvados et Compiegne dans l’Oise. Elle compte 11000 salariés (dont 1700 en France) et commercialise 115 produits.
 
 
Trahison de sanofi
 
 
Tout d’abord Sanofi annonce que la vente est nécessaire pour investir dans la recherche pour trouver de nouvelles molécules. Si on en croit les chiffres du groupe, 6,7 milliards d’euros auraient été investis en R&D en 2023 (il n’y a pas de chiffre sur ce qui est directement investit en France mais la CGT a dénoncé la captation de 1 milliard d’euros de crédit impôt recherche par Sanofi en 10 ans alors que les effectifs R&D ont été réduits de moitié sur la même période !)
 
 
Donc il n’est pas vraiment sûr qu’une rentrée ponctuelle d’argent dope énormément ce montant. Le communiqué du groupe précise d’ailleurs « le produit de la transaction sera utilisé conformément aux priorités actuelles de sanofi, y compris le retour aux actionnaires. » !!! Ils évoquent aussi des « opportunités de croissance externe ». Que restera t il pour financer la recherche après cela, on se le demande !!!
 
 
Et du côté des actionnaires, justement, il y aurait de quoi financer des investissements à long terme en R&D sans vendre les bijoux de famille : Sanofi a versé 4,7 milliards d’euros de dividendes au titre de 2023 et prévoit d’en verser 5,6 en 2026… Pour rappel c’était 1 milliards au titre de 2003…
 
 
Pour investir et financer la recherche, il faut peut être simplement limiter la rapacité des actionnaires !
 
 

Petit rappel historique sur Sanofi

 

Il faut toujours rappeler que Sanofi a été créé en 1973 par Elf Aquitaine (entreprise PUBLIQUE d’exploitation et de distribution de gaz et de pétrole, privatisée en 1994). À la base, ça nous appartient !
 
 

L’intérêt du fond d’investissement américain

 
 
Clayton, Dubilier & Rice disposerait d’un actif de 57 milliards de dollars. Les différents fonds créés par l’entreprise affichent des taux de rentabilité importants. Il est donc évident que les probables 8 milliards investis dans Opella devront générer des dividendes importants pour augmenter la valeur boursière des titres. Comment CD&R va pouvoir accroître la profitabilité de son nouvel actif ?
 
 
Plusieurs options sont sur la table : la découpe et la valorisation de chaque morceau, les délocalisations pour accroître les marges, ou encore l’augmentation des prix des médicaments - grande spécialité des capitalistes américains.  Sur ce dernier point, même si la France ne pèse que 8 a 10% dans le chiffre d’affaire d Opella, c’est tout de même plus de 500 millions d’euros. Sachant qu’il s’est vendu 424 millions de boîtes de Doliprane en France en 2022 (sans compter l’ASPEGIC et tous les autres produits d’Opella), et qu’une partie de ces boites sont prescrites sur ordonnance et donc remboursées à 65% par la Sécurité Sociale, combien coûtera à la collectivité l’opération capitalistique de Sanofi ?
 
 
Pour rappel, le prix des médicaments remboursés est fixé par le Comité économique des produits de santé, en général par négociation avec l’entreprise exploitant le médicament…
 
 
Par ailleurs il ne faut pas écarter la question de l’intérêt national américain. Même si ce n’est probablement pas un sujet qui motive le fond, 25% de la production d Opella est destinée au marché américain. Or les États Unis ont mis en place un plan de réindustrialisation massif. La question d’une relocalisation de la production pourrait donc s’imposer dans les années à venir, d’autant plus qu’une partie des principes actifs des différents médicaments viennent des Etats-Unis (et aussi de la Chine, de l'Inde et de la Turquie).
 
 
Pour le Doliprane il faisait d’ailleurs l’objet d’un projet de relocalisation en France à Seqens en Isère. La cession d’Opella pourrait donc faire capoter le projet en France mais pourrait conforter la production industrielle américaine.
 
 
En France l’usine de Compiègne est particulièrement visée puisqu’elle exporte 60% de sa production (je n’ai pas trouvé de statistique pour Lisieux mais elle est probablement plus tournée vers le marché français puisqu’elle est dédiée au Paracétamol et produit 260 millions de boites qui seront portées à 400 millions fin 2025).
 
 
Alors que la balance commerciale française, historiquement excédentaire dans le domaine médical, est en passe de devenir déficitaire, c’est potentiellement un nouveau recul validé par le Gouvernement.
 
 

Les « garanties » obtenues pas le gouvernement ?

 
 
Les sites et la production seraient protégés pendant 5 ans sous peine d’une pénalité de 40 millions d’euros. D’abord ce montant est ridicule au regard des attentes de retour sur investissement sur 8 milliards ou sur le chiffre d’affaire français de 502 millions d’euros. Ensuite passé 5 ans, c’est terminé…
 
 
Pour l’emploi, une pénalité de 100000€ serait payée par emploi supprimé par « licenciement économique contraint ». Pour 1700 salariés français, c’est donc 170 millions de pénalités maximales, la encore c’est faible.
 
 
Au total, pour un peu plus de 200 millions d’euros, l’américain peut se payer le non respect de ses engagements. Cela doit représenter 4 ou 5 mois de bénéfice net du groupe Opella ! Et si en plus ce bénéfice augmente…
 
 
Il n’est pas crédible de dire que le gouvernement a obtenu des garanties. Il en a obtenu autant qu’avec Mital ou Général Électric…
 
 

Il faut répondre aux besoins de la Nation par les nationalisations !

 
Puisque l’approvisionnement des pharmacies est un besoin vital de la population, puisque l’autonomie de production pour ne pas creuser le déficit commercial est un enjeu stratégique pour le pays, puisque la préservation de l’emploi et de la vie économique des territoires est indispensable, et puisque le capital privé ne répond manifestement à aucun de ces impératifs, alors la seule solution est l’appropriation collectives des moyens de production.
 
 

Si nous n’avons pas d’alternative au capital privé, nous continuerons à subir ses dictats. La nationalisation doit redevenir une revendication syndicale et politique.

 

Laurent Brun Texte publié sur sa page facebook

Publié dans Industries, syndicats

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