Mobilisation à l'ordre du jour dans les fonctions publiques sacrifiées par Macron-Barnier et Kasbarian
Retrait des amendements sur le durcissement du régime d’arrêts maladie, annulation du projet de réforme Guerini, revalorisation du point d’indice… Guillaume Kasbarian, qui a reçu les syndicats de fonctionnaires le 7 novembre, est resté sourd à leurs revendications, concédant toutefois l’enterrement du projet de suppression des catégories (A, B, C). Les syndicats annoncent une grève d’ampleur.
Guillaume Kasbarian a accédé à la demande écrite des syndicats de fonctionnaires, en les recevant pendant près de deux heures, le jeudi 7 novembre. Si le ministre de la Fonction et de la Transformation publique s’est félicité de la teneur d’échanges « constructifs », du côté des syndicats, qui ont présenté face à lui un front uni, la tonalité est pourtant sensiblement différente, à l’issue de ces échanges.
« Sur tous les sujets, il est resté droit dans ses bottes, ne répondant à aucune de nos attentes », s’est indigné Bruno Leveder, secrétaire national de la FSU en charge de la fonction publique.
« Les fondamentaux de la politique mise en œuvre par Macron et ses gouvernements successifs sont confirmés : plus d’austérité budgétaire, moins de politiques publiques », a pour sa part conclu, dans un communiqué, la CGT fonction publique. Tandis que le représentant de Force ouvrière, Christian Grolier, a fini par « claquer la porte » avant la fin de la réunion, dénonçant un ministre sourd aux arguments des organisations syndicales.
Durcissement confirmé du régime d’arrêt maladie des fonctionnaires
Pour FO comme pour la CGT, la FSU et Solidaires, un certain nombre de lignes rouges avaient en effet été dressées que le ministre a allègrement enjambés. À commencer par l’annulation pure et simple des amendements prévoyant un durcissement du régime d’indemnisation des arrêts maladie des fonctionnaires, introduits début novembre au projet de loi de finances, sous couvert d’aligner la fonction publique sur les règles ayant cours dans le privé.
À ces exigences, le ministre a donc opposé une fin de non-recevoir, arguant de contraintes budgétaires indépassables, l’exécutif tablant à travers ces mesures sur 1,2 milliard d’euros d’économies par an (289 millions d’euros avec la carence et 900 millions d’euros avec la baisse de rémunération).
Il maintient donc le projet de ne plus payer les deuxième et troisième jours de leurs congés maladie en allongeant le délai de carence d’un à trois jours ainsi que sa volonté de réduire la rémunération versée aux fonctionnaires en arrêt de travail à 90 % de leur traitement normal, contre 100 % actuellement.
« Il adopte une approche punitive de la maladie, à rebours de toutes les études qui pointent le caractère contreproductif de ces mesures, tout en continuant à stigmatiser les fonctionnaires », s’insurge Sylviane Brousse, responsable de la CGT fonction publique, pour qui le retrait de ces amendements était un préalable à toutes discussions.
Retrait du projet de loi Guerini : pas de suppression des catégories mais les autres mesures restent en débat
Autre point de crispation : le retrait du projet de loi Guerini, resté en suspens après la dissolution de l’Assemblée nationale. Les mesures déclinées à grand renfort de sorties médiatiques par le prédécesseur de Kasbarian prévoyaient notamment primes au mérite, facilitation des licenciements, et suppression des catégories A, B et C de la fonction publique, suscitant un rejet unanime de la part des syndicats de fonctionnaires.
Kasbarian, qui a affiché devant ses interlocuteurs la volonté de prendre acte de ce mécontentement, leur a concédé la promesse de ne pas remettre sur la table cette mesure, considérée comme « une attaque contre leur statut ». Un geste qui n’a pas suffi à désamorcer la méfiance des syndicats, qui déplorent la volonté du ministre de persister à remettre les autres mesures sur la table des discussions.
Gel du point d’indice
Le ministre a également confirmé les craintes syndicales sur la possibilité d’une année blanche pour les fonctionnaires. Kasbarian est en effet resté sourd à leur demande d’une augmentation de la valeur du point d’indice (le mécanisme qui sert à calculer leur salaire de base) – la CGT défend notamment une revalorisation immédiate de 10 % a minima – , confirmant au contraire son gel pour l’année 2024.
Dans une étude publiée le 19 septembre, l’Insee révèle ainsi que, malgré l’augmentation générale de 3,5 % accordée par le gouvernement précédent, après plus d’une décennie de gel du point d’indice, les salaires nets des fonctionnaires ont reculé en moyenne de 1,4 % en 2022, une fois prise en compte l’inflation.
Suppression de la garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa)
Les fonctionnaires devront également renoncer au versement de la garantie individuelle de pouvoir d’achat (Gipa) – une sorte de filet de sécurité qui permet aux agents ayant perdu du pouvoir d’achat sur les quatre dernières années de toucher une compensation financière, ce qui a été le cas pour nombre d’entre eux en raison de l’inflation.
Tandis qu’il a balayé d’un revers de la main toutes mesures visant à améliorer le sort des fonctionnaires, le ministre n’en a pas moins annoncé, en des « termes très flous », selon Christian Grolier, « de nombreux chantiers pour améliorer l’attractivité de la fonction publique, fidéliser les agents et faciliter la gestion de leur carrière ».
« Si son projet, c’est de punir les fonctionnaires quand ils tombent malades, de maintenir leurs salaires à des niveaux indécents, de les stigmatiser à chaque sortie médiatique, c’est très mal engagé », ironise Sylviane Brousse qui, à l’unisson de ses homologues de la FSU, de Force ouvrière, de Solidaires et de l’Unsa (la CFDT s’est montrée plus réservée sur la question), appelle déjà à une mobilisation la plus large et unitaire. Une réunion intersyndicale est prévue le mardi 12 novembre qui devrait déboucher sur un préavis de grève début décembre.
Source : l'Humanité