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Vélos, voitures, piétons : La grogne monte à Lyon...

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

Vélos, voitures, piétons : La grogne monte à Lyon...
Vélos, voitures, piétons : La grogne monte à Lyon...

Ça aurait pu rester une vidéo Instagram parmi des milliers : l’ancienne animatrice télé désormais décoratrice, Cécile Simeone, a conté mi-novembre avoir reçu un coup de poing au visage d’un cycliste qu’elle venait de dépasser alors qu’elle était au volant de sa voiture. Tout en racontant les circonstances de son agression, elle évoquait les difficultés de circulation en ville et pointait du doigt les responsables, à commencer par la Métropole de Lyon.

Il n’en fallait pas plus pour relancer la machine lyonnaise nourrie au clivage jusqu’à la caricature entre bagnoles et cyclos, gauchos et réacs de droite. « Une agression que les #Velofaff s’empresseront d’ignorer ! Si vous leur en parlez, ils la minimiseront en ramenant tout à la méchante bagnole… », commentait illico un twittos, détournant sans finesse le terme « vélotaf » (trajet domicile-travail effectué à vélo).

 

Les sorties vengeresses depuis le début du mandat sont légion entre usagers, et les cyclistes ne sont pas en reste. Chasse aux GCUM (« garés comme une merde »), vidéos avec leurs caméras GoPro de cyclistes outragés par le comportement d’un automobiliste… À Lyon, désormais, dès que l’on parle de vélo, il n’y a plus de place pour la nuance.

 

Au point que lorsque nous l’avons contactée, Cécile Simeone, dépassée par la vague de réactions à sa vidéo, a préféré se faire plus mesurée. « Je ne pensais pas que ça allait être autant relayé. Je suis la première surprise mais je pense que c’est parce que ça touche tout le monde et que tout le monde souffre de ça. »

 

À cette tension s’ajoute du stress, on a peur de se retrouver blessé ou d’être à l’origine d’une blessure un jour. C’est ce que redoute Laurent, chauffeur de bus TCL, qui circule régulièrement en centre-ville : « C’est l’anarchie. Entre les bus, les piétons, les trottinettes, les vélos, les scooters livreurs, les voitures… C’est la catastrophe. Le samedi après-midi, c’est un festival de “qui joue avec la mort” », constate-t-il, amer.

 

Effet grossissant

 

Mais est-ce vrai ? Lyon est-elle un vaste espace pugilistique pour piétons, cyclistes et automobilistes ? Les chiffres de l’accidentologie sont au contraire dans une phase de baisse constante (lire plus loin), la Métropole assure que les feux grillés et les vélos sur les trottoirs sont aussi en décroissance.

 

Mais depuis 2020, les exécutifs écologistes insistent sur la politique cyclable et la nécessaire réduction de la place de la voiture : la Métropole a lancé en janvier un plan vélo 2030 à 500 millions d’euros. Voies de circulations prises à la voiture, zone à trafic limité, Ville 30, multiplication des panneaux de cédez-le-passage aux cyclistes aux intersections… ont un double effet : un sentiment d’injustice dans l’habitacle et d’impunité sur la selle.

Et même si la Métropole a choisi de retarder trois tronçons de Voies lyonnaises à 2026 pour calmer l’incessant chantier qu’est devenu Lyon, les écologistes n’entendent pas pour autant mettre la pédale douce sur le deux-roues. « Je suis à l’aise avec ces arbitrages, tout le monde doit faire des efforts. Peu de villes en Europe auront fait autant que nous à la fin du mandat, même si c’est du rattrapage », assure le vice-président métropolitain aux Mobilités actives Fabien Bagnon, qui reconnaît l’évidente tension qui peuple les déplacements des Lyonnais. Il espère à ce titre que bon sens, communication bienveillante, et achèvement des travaux viendront à terme apaiser les nerfs. 

 

Le bon et le mauvais citoyen

 

Le sujet prend en tout cas depuis quatre ans un espace démesuré dans la parole publique, offrant une plateforme politique parfaite pour critiquer les exécutifs Ville comme Métropole, et flatter les râleurs dans le sens du poil. Les réunions publiques sur les Voies lyonnaises en ont été la démonstration. Objets, dans quelques communes comme à Caluire, d’extrêmes tensions.

 

Et fin novembre encore, lors d’un meeting organisé par le maire du 2e arrondissement et président du groupe d’opposition de droite au conseil municipal Pierre Oliver, le maire d’Écully, Sébastien Michel, tenait ferme le guidon : « Pour les écologistes, il y a le bon et le mauvais citoyen. Dans leur vision, le bon n’est pas celui qui respecte la loi mais celui qui a entre 30 et 40 ans, circule à vélo et mange des graines. C’est dangereux quand on ne considère pas tous les citoyens à égalité. »

Thibaut Chardey, de La Ville à Vélo, constate que « c’est un sujet qui dérive politiquement. Le problème c’est que des élus de droite ont fait du vélo leur principal sujet pour exister en tant qu’opposition politique. Pour nous, le vélo ne devrait pas être politique, de droite ou de gauche. C’est dommage ». Fabien Bagnon est depuis 2020 aux premières loges du débat et en a bien conscience. « Les Voies lyonnaises, “autoroutes à vélo”, c’est un faux procès et une caricature faite par les oppositions. Ils sont malins : c’est dur de critiquer une piste cyclable, mais reprocher des autoroutes à des écolos… »

 

« On a l’impression que c’est l’Œuvre du mandat »

 

David Kimelfeld, ex-président de la Métropole qui, sous la Covid, avait lancé les pistes cyclables temporaires, tempère : « Il faut faire la part des choses et se garder d’une récupération politique qui mène à l’exagération. Heureusement qu’il y a des aménagements faits. » Le président du groupe Social, démocrate et progressiste à la Métropole a la dent plus dure sur la manière dont Ville et Métropole présentent leurs priorités.

 

« C’est toujours la même chose avec eux, c’est la conflictualisation du sujet. Il y a un phénomène d’escalade, comme s’ils voulaient absolument dérouler du kilomètre dans leur bilan. Ils y vont à fond, mais s’il y a certains aménagements que nous aurions faits aussi, certains autres posent question : ils font doublon, ou provoquent de vrais blocages. Il faut prendre le temps de mettre en pause et regarder ce qu’on a fait. C’est cette intensité, cette espèce d’idéologie qu’il faut tout faire tout de suite, qui me frappe un peu. On a l’impression que c’est l’Œuvre du mandat. » Les toutes récentes temporisations sur les Voies lyonnaises tendent à démontrer que le message a finalement été entendu, au moins partiellement.

 

La peur de la sanction dans les urnes ? Le progressiste en doute. « Les gens sont très opposés sur le moment et après, il y a une sorte de fatalisme. Mais je ne pense pas que les Lyonnais vont se lever un dimanche, voter pour ou contre les Verts ou la droite sur ce sujet-là en 2026. » Fabien Bagnon renverserait même la problématique : « Quoi qu’il en soit, on en aura fait beaucoup, certains diront trop. Ou diront que l’on n’en a fait que pour le vélo, ce qui est totalement faux. Alors oui, c’est un enjeu électoral. Mais il faut continuer : on a fait ce qu’on avait promis.»

Les chiffres du vélo à Lyon

Selon la FUB (Fédération française des usagers de la bicyclette) Lyon est la 6ville cyclable française (étude de 2021). En chiffres :
 
  • 1 217 kilomètres d’aménagements cyclables : + 40 % depuis 2020.
  • 4 millions de passages sur la Voie lyonnaise 1 en 2023 au niveau du croisement avec le pont Lafayette.
  • 32 000 arceaux pour vélos dans la métropole, soit 64 736 places disponibles. Objectif de 60 000 arceaux pour vélos en 2026.
  • 428 stations Vélo’v. 2 500 nouveaux Vélo’v électriques déployés en janvier 2025.
  • 12,6 millions de locations de Vélo’v en 2023.
  • 4 800 panneaux M12 (cédez-le-passage aux cyclistes) à horizon 2026.
  • 260 kilomètres de Voies lyonnaises prévues.

 

Ce que la Métropole investit :

 

  • Plan vélo (déployé depuis 2021, achevé à l’horizon 2030) : 500 millions d’euros.
  • Déploiement des Voies lyonnaises (2021-2026) : 282 millions d’euros.
  • Aide à l’achat de vélos (2021-2026) : 20 millions d’euros.
  • Free Vélo’v (vélos verts prêtés aux étudiants pour un an) : 3,9 millions d’euros (2021-2025), 3 679 contrats signés en 2023.
  • Locaux pour vélos à destination des agents de la Métropole (2021-2026) : 2 millions d’euros.
  • Déploiement des arceaux pour vélos (2021-2026) : 5,2 millions d’euros.

 

Publié dans Métropole de Lyon

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