Marine Tondelier : « Si le NFP se rétrécit, il se contraint à perdre »

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

Marine Tondelier : « Si le NFP se rétrécit, il se contraint à perdre »

Après la motion de censure sur le budget que les socialistes n'ont pas votée mercredi, provoquant l'ire de LFI, le Nouveau Front populaire n'a jamais paru aussi proche de la rupture. La patronne des Ecologistes, malgré ses divergences avec les uns et les autres, martèle plus que jamais la nécessité de l'union.

 

Toujours sur un fil, la survie de l'alliance des gauches a rarement paru aussi incertaine, après le refus, par deux fois, des socialistes de mêler leurs voix à celles du reste du NFP pour battre le projet de budget austéritaire. Quand certains appellent à rompre pour de bon, Les Ecologistes, qui ont fait de l'union un marqueur identitaire, tentent tant bien que mal de raccrocher les wagons. Même s'ils sont loin d'adhérer à certains choix du PS ni aux méthodes des Insoumis.

 

Qu'est-ce qui a motivé votre décision de voter la censure sur le budget ?

 

Je pense que c'était le seul vote cohérent possible. Nous avons pris nos responsabilités, nous avons discuté avec ce gouvernement, nous avons essayé de nous interposer socialement et environnementalement entre eux et les Français. On a réussi à s'épargner certaines choses, mais ce ne sont pas des avancées, comme j'ai pu l'entendre chez certains : ce sont des non-reculs, ce qui est très différent.

 

C'est le budget le plus austéritaire que la France ait connu depuis longtemps. Et l'environnement y a été sacrifié. Le gouvernement a ajouté 1 milliard de coupes aux 2 milliards que prévoyait déjà le budget Barnier. En censurant l'écologie dans ce budget 2025, le gouvernement ne pouvait pas s'attendre à autre chose qu'à la censure des Ecologistes. Ils le savent et ne nous en ont d'ailleurs majoritairement pas fait le reproche.

 

Mais retenez bien que cette censure ne fait plaisir à personne chez nous : nous n'en retirons aucune fierté. Tout cela est du gâchis. Et c'est tellement incompréhensible que les budgets de l'écologie baissent alors que les températures ne cessent de monter… Je rappelle d'ailleurs que les économistes soulignent que l'inaction climatique nous coûtera au moins 5 fois plus cher que si nous agissions aujourd'hui. Cela n'a pas de sens environnementalement. Mais économiquement et budgétairement non plus.

 

Comprenez-vous le choix des socialistes de ne pas censurer le budget mais de déposer une motion sur les « valeurs » ?

 

Je ne suis pas d'accord avec la décision des socialistes de ne pas censurer. Ils ont eu peur de mener la bataille jusqu'au bout. Je pense qu'on doit avoir plus d'ambition que ça. Parce qu'un budget, une fois qu'il est adopté, il est cranté. C'est-à-dire qu'il sert de référentiel pour les exercices suivants.

 

Concernant la motion de censure du PS sur « les valeurs », je crains l'effet pistolet à eau : ils choisissent le sujet sur lequel ils sont sûrs que jamais le RN ne se mobilisera. Et puis, surtout, je me demande dans quelle mesure c'est lisible, alors qu'ils n'auront pas voté les cinq premières censures. Ça ne veut pas dire qu'on ne la votera pas mais il y a un côté comedia dell'arte, où pour racheter leur crédibilité d'opposants, ils disent : « Allez, on en fait une de plus sur les valeurs ».

 

Le visuel publié mercredi soir et attribué à LFI, qui place Marine Le Pen et Olivier Faure sur le même plan, a mis le feu aux poudres. Qu'en avez-vous pensé ?

 

C'est la honte. Je pense par ailleurs que LFI a suffisamment souffert de la comparaison LFI-RN pour éviter de se prêter à son tour à ce petit jeu. Je pense que ça a choqué tout le monde. Et que dans la vie, comme en politique, ça ne devrait pas être si difficile de s'excuser quand on a fait un truc pas correct.

 

Le NFP peut-il survivre aux violentes passes d'armes entre LFI et le PS, et à « l'interruption » de l'alliance dans sa forme actuelle décrétée par les Insoumis ?

 

J'estime que tout ça doit être surmonté. Ce qui se passe est du gâchis, ça donne un spectacle déplorable. Beaucoup des personnes qui nous ont fait confiance cet été doivent être un peu désespérées. Le petit concours de « retenez-moi ou je fais en malheur » et en train de démobiliser notre camp. Là où ce qui se joue, c'est les municipales, c'est les politiques qui vont être menées dans chacune des communes de ce pays.

 

Le NFP, c'est quatre forces politiques. Si le NFP se rétrécit, alors il se contraint à perdre.

 

Quand on est écologiste, on croit beaucoup en la biodiversité. Un écosystème est riche de sa diversité, et c'est normal que, des fois, même si on a les mêmes objectifs, on n'ait pas les mêmes stratégies. Personne ne pense que ce sera facile, évident, confortable.

 

Mais vous pouvez compter sur les écologistes pour rester très déterminés à ce que le NFP non seulement persiste, mais s'élargisse, parce qu'on n'a pas le choix pour gagner. Parce que si en 2027 la France tombe, c'est toute l'Europe qui vacille.

 

Quand on regarde Trump, quand on regarde Milei, quand on regarde cette amicale fasciste qui est en train de s'organiser au niveau mondial, l'Europe a un rôle immense à jouer. Quand vous regardez le décalage entre les enjeux, dont on doit être à la hauteur, et le spectacle qu'on donne, je trouve ça parfois à la limite de l'indécence.

 

Hadrien Valat Article publié dans les Echos

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article