Gaza : 11 000 corps encore sous les décombres et la faim propagée « de manière délibérée »
Après cinquante jours de siège réimposé par Israël, l’ONU dénonce une situation humanitaire qui serait « actuellement la pire depuis le début de la guerre ». 11 000 corps de Gazaouis tués dans les bombardements seraient encore coincés sous les décombres.
Après bientôt deux mois sans qu’« une once de nourriture n’ait été livrée à Gaza », le chef de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini, a une nouvelle fois fustigé l’attitude d’Israël, dont les forces militaires bloquent toujours les points d’entrée de la bande côtière.
Près de 3 000 camions humanitaires bloqués
Malgré la mobilisation des agences humanitaires, près de 3 000 camions chargés de vivres, de médicaments et d’autres biens essentiels attendent toujours une autorisation pour entrer dans Gaza, a signalé le site d’information de l’ONU, mardi 22 avril.
« La faim, d’origine humaine, se propage et s’aggrave de manière délibérée », a affirmé Philippe Lazzarini, en condamnant des autorités israéliennes accusées de laisser la situation se dégrader, allant jusqu’à utiliser l’aide humanitaire comme une « monnaie d’échange » et une « arme de guerre » afin d’infliger une « punition collective » aux habitants de l’enclave.
« Combien de temps encore avant que (les) paroles creuses de condamnation ne se traduisent par des actes pour lever le siège, rétablir un cessez-le-feu et sauver ce qui reste d’humanité ? Cela fait cinquante jours que le siège est imposé par les autorités israéliennes », a dénoncé le haut responsable onusien, pour qui Gaza est devenue une « terre du désespoir ».
« La pire situation humanitaire depuis le début de la guerre »
Le Bureau des affaires humanitaires des Nations unies (Ocha) a rappelé qu’il s’agit de la plus longue période sans aide ou marchandises entrant dans la bande depuis octobre 2023. « Nous nous dirigeons vers un désastre total ; la situation humanitaire est actuellement la pire depuis le début de la guerre », a déclaré le porte-parole Jens Laerke, lors d’une conférence de presse tenue ce mardi, à Genève.
Selon l’Unrwa, les stocks de nourriture seraient « presque épuisés », avec seulement 250 colis alimentaires restant sur place. « La farine est épuisée, les boulangeries ferment, les hôpitaux s’effondrent faute de carburant ou de médicaments, et les prix des rares produits de première nécessité ont grimpé en flèche », rapporte l'ONU.
11 000 corps emprisonnés sous 40 millions de tonnes de décombres
Depuis New York, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Stéphane Dujarric, a mis en garde contre la fermeture imminente d’un grand nombre de cuisines communautaires, dont 180 d’entre elles continuent de fonctionner quotidiennement à Gaza. « Faute de gaz de cuisine, les familles se contentent de brûler du plastique pour cuisiner », a-t-il indiqué, ajoutant que des bombardements israéliens avaient interrompu, mardi, les services de traitement des déchets solides à Gaza.
Un « incident majeur », pour l’ONU, alors que l’enclave est ensevelie sous plus de 40 millions de tonnes de décombres en raison des frappes de l’armée israélienne.
Ces bombardements ont aussi causé la destruction de bulldozers, paralysant les opérations de secours et rendant encore plus difficile l’accès aux quelque 11 000 corps encore emprisonnés sous les décombres, certains depuis plus d’un an.
L’ONU estime qu’environ 92 % des bâtiments résidentiels de Gaza, soit environ 436 000 maisons, ont été endommagés ou détruits depuis octobre 2023.