Analyse du Projet de Plan Régional Santé de la région AURA

Publié le par Front de Gauche de Pierre Bénite

Lyon Sud et la Croix Rousse Lyon solidaires dans la bagarre pour sauvegarder l'hôpital public !

Lyon Sud et la Croix Rousse Lyon solidaires dans la bagarre pour sauvegarder l'hôpital public !

Cette analyse succinte du Plan Régional Santé Aura a été réalisée par Jean Claude Vaslet, expert sur les questions de santé.

C'est un outil important au moment où ce projet de santé à l'échelle régional sera appliqué ensuite de 2018 à 2028, c'est à dire lors les 10 ans à venir. Le PRS est le fruit de la puissance publique, il est porté par l'Agence Régionale de Santé qui le soumet jusqu'au 31 avril à la consultation et à l'avis des institutions territoriales de la Région (Communes - départements - Région - Métropole) et des corps intermédiaires, syndicats, associations de santé, etc.

***

1) Du point de vue de la méthode

  • Un état des lieux d’une apparente neutralité méthodologique qui vise à masquer les conséquences des choix politiques de ces dernières années ;

  • Un retravail sur les concepts essentiels (Inégalités ; disparités ; solidarité ; etc.)

  • Un satisfecit à peine voilé pour l’ex-région RA opposée à l’Auvergne. (Si on n’a pas de bons chiffres c’est à cause d’eux…)

  • Une présentation du constat des inégalités en forme d’oppositions quasi naturelles, le plus souvent reliées à une situation géographique (Est/ouest ; Nord-est/Sud ;)

  • Absence ou quasi absence d’analyse longitudinale qui permettrait de connaître l’évolution des situations décrites ;

  • Le parti pris pour les concepts et politiques libérales.

2) Un constat d’échec des politiques publiques

C’est un constat d’échec cuisant des politiques d’austérité et des politiques publiques : santé, aménagement du territoire. Les inégalités progressent.

On entrevoit toutefois les conséquences des choix politiques réalisés en termes :

  • De la politique de métropolisation qui aggrave les inégalités;

  • De l’absence de politique industrielle ;

  • De politiques d’aménagement du territoire qui conduisent à sa désertification et la disparition de services publiques ;

  • De la destruction de la médecine scolaire et universitaire et de la médecine du travail ;

  • De destruction du maillage territorial du service public hospitalier et du secteur médico-social et social ;

On perçoit l’accroissement des inégalités et la corrélation étroite entre désertification industrielle, précarisation, paupérisation et accès aux soins.

Les fractures présentées comme naturelle, géographiques, sont avant tout des fractures de classes.

3) Une instrumentalisation idéologique des avancées technologiques et de privatisation des activités de santé

Tout d’abord, le diagnostic réalisé sur les caractéristiques des séjours (séjours plus courts et maladies plus longues) est en trompe l’œil. Il ne décrit pas à la réalité parce que les outils d’analyse sont tronqués. Ils ne prennent pas en compte les biais imposés par la T2A et par la course effrénée à l’ambulatoire.

La réduction de la durée des séjours est attribuée fort opportunément aux progrès de la médecine, sans qu’aucun indicateur qualitatif ne vienne corroborer ce point.

Cette prétendue analyse objective est destinée à étayer une vision de l’institution hospitalière réduite à un traitement des épisodes de crise réglé à l’aide d’un plateau technique en quelques heures.

Sur tous les sujets, tout se passe comme si l’ARS déniait toutes les difficultés rencontrées au quotidien par les patients et les professionnels en faisant miroiter un développement considérable du numérique ?

L’illusion consiste à laisser croire que la main de l’homme est désormais très réduite voire inutile, et que ce serait des archaïsmes corporatistes qui freineraient les évolutions naturelles. Comme par exemple le secret médical.

Il suffirait de sortir de la culture de la « médecine curative » :

  • Mettre en place des « parcours éducatifs de santé de la maternelle au lycée » ; (Pas la médecine scolaire et universitaire)

  • « Accompagner chacun à prendre en charge sa propre santé »; (Que devient la médecine du travail ? Le CHSCT ?)

  • « Accompagner les familles dans une démarche de responsabilisation » ; (que de discours moralisateur ou culpabilisateurs)

Pour

  • « Agir soi-même sur sa propre santé »

  • « Vieillir en santé » ;

  • « Retarder l’apparition des maladie chronique »

Quand au mirage ambulatoire, les objectifs de casse du service public et de privations sont clairement exprimés.

« Le virage ambulatoire, est un objectif plus large que la transformation de la chirurgie classique en chirurgie ambulatoire. Il s’agit d’un repositionnement plus global des établissements de santé au sein de l’organisation de la santé, qui vise à ce que l’hôpital se concentre sur la production de soins aigus, sur la base de son plateau technique, et laisse d’autres acteurs prendre en charge l’amont et l’aval de cet épisode de soins aigus. »

4) Un renforcement des principes des restructurations et une accélération des mises en œuvre

  • Utilisation des GHT comme moyen de concentrer les structures hospitalières publiques ;

    • Accélération des fermetures de lits, de services d’urgences, de maternités, de services de médecine, de blocs opératoires de proximité.

    • Amplification des externalisations (privatisations). Après les services supports (ménage, restauration, blanchisserie, traitement des déchets, stérilisation, etc.), on passe aux services administratifs (compta, RH) et au traitement des données médicales (PMSI).

    • Sélectivité dans la délivrance des autorisations d’activité en vue de privatisé les activités de soins. (Imagerie, chirurgie, médecine, labo, etc.)

  • Liquidation de la psychiatrie humaine via les axes suivants :

    • Un malade doit être économiquement utile (laboratoires pharmaceutiques) ou socialement invisible (prison).

    • Moments de crise gérés soit par l’hôpital général (Urgences psy) soit par le système carcéral (UHSA, UMD) ;

    • Traitement au long court défini comme un handicap géré par le médico-social (pas ou moindre de financement sécu) : FAM, MAS, etc

  • Concentration des structures médico-sociales, notamment celles qui prennent en charge les personnes âgées.

    • Application d’une T2A au médico-social

Dans ce dispositif qui tend à culpabiliser et isoler les patients et les personnes en perte d’autonomie, les « aidants » sont mobilisés afin de promouvoir une « politique d’inclusion en milieu ordinaire ».

Autrement dit, au nom de la solidarité il revient « aux aidants » de prendre en charge les anciens ou les malades. C’est la « CONDITION pour répondre aux attentes sociales… »

5) L’émergence et le développement d’une technocratie autoritaire

A une démocratie sanitaire qui n’avait de démocratie que le nom, se substitue une technocratie de plus en plus autoritaire, doublée d’une bureaucratie tentaculaire.

  • Les instances délégataires sont contournées pour l’élaboration du PRS, pour la validation des orientations prétendument proposées, du contrôle de sa mise en œuvre. L’ARS vit pour elle-même.

  • Les corps intermédiaires sont de fait systématiquement réduits à des faire-valoir ; leur vocation de média entre l’état et les populations ou les professionnels leur est dénié.

  • Les associations de patients qu’il convient de former pour qu’ils soient rompus aux orientations de la gestion libérale sont les seuls à devenir digne de confiance et nécessaire à l’accompagnement des orientations stratégiques.

  • Une politique de propagande idéologique se met en place, en direction des populations.

Le sens des mots est systématiquement détourné, après avoir été déconstruit. Cette propagande vise à transformer le patient en consommateur de soins de santé.

  • Le secret médial est remis en cause parce qu’il serait un frein au développement du numérique.

« Indépendamment des systèmes de représentation institutionnelle des usagers, l’agence va être amenée à développer progressivement des dispositifs de « démocratie directe », la mettant en relation avec les usagers de la santé sans intermédiaire. »


 

Publié dans Région

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