La Fête, le Marxisme et le Goujat par Bernard Dupin

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Il est toujours intéressant de prendre quelques jours de recul pour apprécier tous les bons moments vécus à la fête de l'Huma. Que la presse dite libre occulte, transforme, dénature ou déroule le tapis rouge (sic) à tous les anticommunistes invités n'est pas une surprise, cela relève d'une logique politique. La liberté a ses limites chez les capitalistes qui détiennent les moyens d'information.
 
 
Restons donc dans le vécu des très bons moments avec par exemple parmi les 48 artistes programmés, la présence de Gauvin Sers qui en se présentant comme le chanteur creusois à casquette en velours côtelé marron, montrait d'entrée qu'il savait cultiver l’auto-dérision.
 
 
Mais quel chemin parcouru depuis ma découverte de Gauvin Sers au Festival Jean Ferrat d'Antraigues en 2018. On est passé en effet avec lui du chanteur presque timide qui se produisait sur la Place de La Résistance ardéchoise, au chanteur plein d'assurance parfois bondissant d'un côté à l'autre de la scène pour dérouler ses chansons à fort caractère sociétal et d'autres dans une veine plus intimiste, le tout sur fond de mélancolies ciselées et d'arrangements folk, parfois légèrement pop mais toujours dans la grande lignée de la chanson française. Il se sentait bien le Gauvin sur la scène de l'Huma et il le répétait souvent comme pour démontrer sa franchise.
 
 
Il n'était pas là par hasard, il connaissait l’événement et remerciait Marcel Cachin d'avoir inventé cette fête incroyable en septembre 1930 et déclarait être fier de participer à cette 87ème édition en attendant d'être invité pour les suivantes. Il ne put même s’empêcher de descendre de la scène et de sauter les barrières, pour chanter en chœur au milieu du public « les oubliés », un moment de grande communion.
 
 
Dans un tout autre domaine, c'est le chœur du Canto dirigé par Jean Golgevit qui s'élevait de l'immense scène qui l'avait vu naître pour chanter le Chant général, cette œuvre magnifique du musicien Mikis Théodorakis sur l’œuvre du poète Pablo Néruda et qui symbolise la lutte contre la dictature pinochétiste et en soutien au gouvernement d'Unité populaire dirigé par le président martyr Salvador Allende. Golgevit a su faire stopper toutes les musiques alentour avant de commencer à emporter le public vers les sommets.
 
 
Mais la fête de l'Huma ne serait pas la fête de l'Huma sans son village du livre et les débats qui permettent de découvrir de nombreux écrivains aux styles très différents. On ressort chaque année de ce village avec la confirmation que l'on peut voyager et s'évader grâce aux livres et sans avoir besoin de bouger de son canapé. Cette année aura été marquée par la rencontre avec l'ami héraultais Jean Kouchner qui après son périple au travers les Alpes dédicaçait son roman « Soleils d'Or » inspiré en partie de l'affaire Rey-Maupin qui fut un fait divers retentissant dans les années 90 et qui raconte la dérive violente d'une jeunesse qui ne trouve pas sa place dans la société et qui est en quête d'un idéal. Jean Kouchner, un journaliste écrivain, engagé toujours disponible et enrichissant.
 
 
La fête de l'Huma ce sont des centaines de débats politiques avec des personnalités et où il est toujours difficile de faire des choix pour y assister. J'en retiendrai au moins deux : celui qui portait sur « la révolution écologique et les conditions économiques pour la réussir » avec entre autres, Sandrine Rousseau et l'économiste communiste Frédéric Boccara. Une Sandrine Rousseau manifestement mal à l'aise, la jambe en perpétuel balancier et le sourire narquois comme pour masquer d'énormes faiblesses en économie, ce qui faisait dire à Frédéric Boccara sans langue de bois, « qu'il fallait quand même se renseigner quand on vient débattre à la fête de l'Huma ». Circulez, il n'y avait plus rien à voir avec la moraliste chouchou des médias.
 
 
Le second débat avait comme sujet un brin provocateur, « la laïcité est-elle encore de gauche ? » Nicolas Cadéne, l'ancien rapporteur général de la laïcité survolait les débats tellement la laïcité fait partie de son ADN quant à Pierre Laurent, il contribuait à développer tous les aspects politiques sur le sujet. Carole Delga, apparaissait morne et sans enthousiasme et s’empêtrait par de nombreux mensonges à vouloir défendre son ami Michael Delafosse le maire de Montpellier dans ses relations sur la fête religieuse de la Saint Roch dans sa propre ville.
 
 
Comment ne pas parler du concert de Cyril Mokaiesh au savant mélange de rock énergique et de texte soigneusement travaillés et portés par une voix sensible et puissante et qui se plaisait à terminer son spectacle avec son fameux « je suis communiste… à c'qui parait ».  Quoi de plus naturel à la Fête de l'Huma !
 
 
Comment parler de tous les autres concerts proposés ? Si, juste pour dire l'impressionnante foule agglutinée jusqu'à l'asphyxie le samedi soir pour Maitre Gims et ses compères de Sexion d'Assaut et dimanche avec la famille Dutronc avec les grands classiques du papa pour qui ça commence quand même à devenir difficile d'avancer « en retournant sa veste ».
 
 
Et puis il n'y aurait pas de fête de l'Huma sans la solidarité et la fraternité toujours présente au village du monde. Des rencontres passionnantes au travers de la trentaine de barnums de toutes nationalités pour exiger le retrait du blocus cubain, la libération de Salah Hamouri, etc, etc... Une solidarité internationale qui s'exprime toujours avec bonheur et détermination au milieu de nombreuses spécialités culinaires incroyablement goûteuses.
 
 
Enfin, quand même deux mots sur la fausse polémique sur la valeur travail. Marx dans son analyse sur le sujet faisait référence aux ouvriers qui travaillaient dans les mines et qui étaient réduits à exercer qu'une seule fonction, en boucle, sans réfléchir dans le seul but de subvenir à leurs besoins. Ce travail avait donc un effet d'aliénation qui empêchait d'agir, de réfléchir et de s'imaginer.  Marx voulait donc démontrer que l'homme a besoin d'un travail dans lequel il puisse s'épanouir en mettant en œuvre toutes ses capacités physiques comme intellectuelles.
 
 
Aujourd'hui, la crise du système capitaliste, trouve ses origines dans l’exigence de rentabilité du capital et se caractérise par une mise en concurrence exacerbée du monde du travail avec la persistance du chômage de masse, une dégradation constante du rôle, de la place, des conditions et du sens du travail.
 
 
Fabien Roussel nous invite donc tout naturellement à réfléchir pour reprendre la main collectivement sur le travail, sur sa qualité, car cela doit permettre à la fois de libérer les êtres humains de l’exploitation capitaliste et de construire un développement humain durable, condition d’une véritable transformation sociale. Cette réflexion n'est pas nouvelle, elle a toujours été portée par le Secrétaire Général du Parti Communiste par exemple lors de sa campagne des présidentielles, sans que cela génère la moindre polémique.
 
 
Donc, que dans la période, Jean Luc Mélenchon tel un goujat qui sans attendre la fin de son invitation lance sa petite manœuvre et que celle-ci soit reprise et amplifiée jusqu'à la nausée par ses proches devrait nous interroger. La proximité de la préparation d'un congrès du PCF est en effet une échéance importante pour tenter de déstabiliser de l'extérieur, mais aussi de l'intérieur des débats qui n'existent pas dans son mouvement gazeux.
 
 
Au vu de la situation politique nationale et internationale, ce n'est sûrement pas par ce type de stratégie que pourra se construire une alternative aussi bien indispensable qu'urgente.
 
 
Voilà donc en quelques mots quelques souvenirs personnels de cet incroyable événement populaire, festif, éducatif et politique que représente cette fin de la Fête de l'Huma. Un événement incontournable.
 
 
La Fête 2022 est terminée, vive l'édition 2023 !
 
 
Bernard Dupin.

Publié dans Fête Humanité 2022, PCF

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article