Biden orchestre avec l’Otan une dangereuse montée d’agressivité impérialiste contre la Chine

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Biden orchestre avec l’Otan une dangereuse montée d’agressivité impérialiste contre la Chine

Par Bruno Odent Céder à ces injonctions d’une « Amérique de retour » qui aurait vocation à « guider le monde », selon la rhétorique répétée à l’envie par Biden, c’est faire courir un risque infernal d’affrontement, de guerre qui aurait des conséquences existentielles pour l’humanité.

Joe Biden a abattu ses cartes. Il est venu en Europe en chef de guerre soucieux de rassembler ses alliés pour faire converger avec eux, escalade militaire et montée des invectives diplomatiques explicitement dirigées contre la Chine. Le G 7 puis le sommet de l’Otan le 14 juin et même sa rencontre avec Vladimir Poutine à Genève, quelques jours plus tard, ont consacré cette amplification de la menace impérialiste. La formidable offensive entamée par Donald Trump sur le registre commercial est renforcée et étendue.

Les pressions militaires s’accentuent en mer de Chine. Avec des manœuvres aéronavales auxquelles a participé la France. Le « pivot » stratégique – le redéploiement depuis le Moyen – vers l’Extrême-Orient de l’US armada déclenché par Barack Obama – est en cours d’achèvement. Washington veut tout faire pour conforter une hégémonie mondiale ébranlée, voire contestée, et empêcher la poursuite de la montée en puissance de la Chine dans de nombreux domaines, de l’économie jusqu’à la recherche, le spatial ou la maîtrise de procédés de fabrication de pointe.

L’Europe et la France s’alignent sur ce changement de pied atlantiste.

La «Maison-Blanche» a enfilé sa tenue de camouflage dans un discours binaire et manichéen, si propre aux préparatifs de guerre. Pour faire état d’une volonté états-unienne de «fédérer les démocraties» face aux « menaces des autocraties .» Entendez la Russie et surtout la Chine. Car la main tendue à l’homme fort du Kremlin à Genève le 16 juin montre combien les stratèges US s’efforcent d’éviter la formation d’un potentiel axe Pékin Moscou contre leur ambition de reprise en main globale.

Difficile de croire au bienfondé d’une mobilisation générale contre un nouveau péril jaune, ou une sainte alliance contre les discriminations dont sont victimes les ouighours, quand des régimes aussi irréprochables dans l’exercice du droit, de la démocratie, et du respect des minorités, comme la Turquie au cœur de l’Otan, figurent parmi les principaux passagers de cette entreprise. Aux côtés de ces autres alliés, phares bien connus du « monde libre » que sont l’Arabie Saoudite, les Émirats ou Israël.

La France d’Emmanuel Macron a bousculé les rangs pour venir se mettre au garde à vous atlantiste. En éclaireur elle a participé au printemps à ces manœuvres aéronavales dirigées par Washington en mer de Chine. Et elle a engagé à nouveau ses partenaires du vieux continent à gonfler leurs dépenses d’armement pour bâtir une « Europe de la défense » dont l‘Elysée précise , à chaque fois qu’elle serait « complémentaire de l’Otan». Ce qui souligne le double langage macronien affirmant des velléités de « souveraineté européenne » quand il s’agit en fait de participer pleinement à la course aux armements sous l’égide de l’Alliance atlantique, à meilleur compte pour les Etats-Unis.

Le budget militaire US avaient battu des records de hausses historiques sous Trump. Biden les a encore pulvérisé en annonçant en mai qu’il porterait ces dépenses à 715 milliards de dollars (603 milliards d’euros) en 2022, soit une hausse de 11 milliards de dollars (9,3 milliards d’euros) sur celles de l’année en cours.

Elles représentent à elles seules le total des budgets des armées des dix plus grandes puissances militaires qui suivent les Etats-Unis, Chine, Russie, France et Royaume Uni compris. Et cette fuite en avant dans la course aux armements n’a pas vocation à rester «dissuasive».

Le chef de la diplomatie US, Anthony Blinken, homme lige du complexe militaro-industriel des Etats-Unis (1), n’en fait pas mystère. Il est l’auteur d’une sorte de manifeste bipartisan, coécrit avec le chef de file des néoconservateurs, Robert Kagan, pour réhabiliter le recours à la force par l’oncle Sam, en dépit des désastres enregistrés en Afghanistan et en Irak. Ce texte, paru dans le Washington post du 4 janvier 2019 martèle: «la force est nécessaire et complémentaire d’une diplomatie effective.» Sans capacités « à projeter la puissance appropriée, aucune paix ne pourra être négociée, encore moins imposée. » L’Otan est appelé à englober «l’Europe et l’Extrême-Orient.» Il faut, plaide le démocrate et l’ex égérie du républicain George W. Bush, « une nouvelle institution pour forger une vision stratégique commune sur les plans économique et politique qui n’inclut pas seulement la sécurité militaire mais aussi la cyber-sécurité et d’autres menaces.»

Céder à ces injonctions d’une « Amérique de retour » qui aurait vocation à « guider le monde » , selon la rhétorique répétée à l’envie par Biden, c’est faire courir un risque infernal d’affrontement, de guerre qui aurait des conséquences existentielles pour l’humanité. Avec des effets assurément plus rapides et dévastateurs que ne l’est le réchauffement climatique qui la menace déjà d’extinction lente. D’autant que l’inflation de la production d’armes, et à fortiori l’explosion de conflits, sont de formidables souffleurs d’émissions carbonées.

En face il ne faut donc rien moins qu’une mobilisation générale pour la paix. Avant qu’il ne soit trop tard. C’est dire le besoin d’une force politique comme le PCF en France capable de démasquer les mécanismes de l’impérialisme US, profitables au lobby militaro-industriel US comme à la domination des champions de Wall Street, Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) en tête.

Une force capable d’avancer des propositions alternatives pour un vrai multilatéralisme, voué à réduire les tensions sur la planète et à éradiquer la guerre. En avançant des propositions précises pour l’émergence de nouvelles institutions internationales , telles l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE). Mais avec des pouvoirs de contrôle et des droits d’interventions bien plus importants pour les citoyens du monde.

Les communistes français ont un rôle politique crucial à jouer pour contrer cette course à l’abîme et rassembler le plus largement possible pour la mère de toutes les luttes, celle pour la paix.

Car une certaine Biden-mania pèse sur la lucidité d’une bonne partie de la gauche et des écologistes français. Que le parti socialiste et une partie des verts français s’associent aux socio-démocrates du parlement européen pour demander que l’Europe soit «à la hauteur » des visées internationales du locataire de la Maison-Blanche en osant , comme lui, « hausser le ton face à la Chine.» Ou que Jean Luc Mélenchon encense les différents plans de relance US jusqu’à prétendre que les décisions du président des Etats-Unis « donnent un point d’appui à des gens comme moi.» Sans voir combien ces milliers de milliards de dollars, destinés d’abord au capital US et à ses champions, sont aussi siphonnés du reste du monde grâce aux privilèges du billet vert, monnaie commune mondiale de fait (2). Les mastodontes de Wall street sont boostés pour mieux dominer le monde, en pleine cohérence avec la frénésie de dépenses d’armements et les roulements de tambours anti-chinois de la Maison-Blanche.

Bruno Odent

  1. Anthony Blinken, pilote du « retour de l’Amérique » in l’humanité du 2 décembre 2020
  2. Conf Frédéric Boccara dans le dernier numéro de la revue économie et politique ( 802/803)
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