La liberté commence à l’entreprise par Jean Christophe Le Digou

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

De l’absence de réponse aux mouvements sociaux et revendicatifs à l’usage immodéré du 49.3 utilisé pour tuer tout débat, la crise de la démocratie ne fait que croître. Le lien social est profondément affecté. Les instruments traditionnels d’intervention publique à la disposition de l’État ne fonctionnent plus.

 

Or, c’est une des spécificités de la France que de fonder le lien social sur des valeurs politiques. Quand ces dernières ne sont plus partagées, les règles elles-mêmes se trouvent affaiblies ce qui renforce encore l’intensité des problèmes posés.

 

Le patronat se préoccupe de l’entreprise, en étant globalement arc-bouté sur ses exigences, se croyant légitime quand il subordonne le besoin de liens sociaux et de solidarités construites, aux règles de la rentabilité. Pour le patronat la démocratie doit rester à l’extérieur de l’entreprise. La droite quant à elle semble tentée par une méthode de gouvernement privilégiant le levier des peurs et permettant le retour d’un pouvoir tutélaire.

 

La gauche tout en mesurant l’importance du problème démocratique reste étonnamment timorée, paraissant parfois se rallier à la conception d’un « État fort » en la corrigeant à la marge d’un soupçon de « participatif » et de décentralisation.

 

Pourtant, c’est désormais une partie de la France qui part à la dérive. L’angoisse sociale gagne du terrain et se mue en peur du « métissage ». L’idée de Nation s’étiole et pour certains se réduit à un nationalisme populiste, raciste que porte une extrême droite désormais en embuscade.

 

La droite extrême prétend lier les réponses à la crise économique et sociale par l’exacerbation du nationalisme et de l’autoritarisme. Elle en fait la clé de sa stratégie politique et a pour ambition d’influencer la droite classique. Et crise économique oblige, elle investit le terrain de la solidarité, n’hésitant pas à se couler dans le courant idéologique de « l’exception française ». Son hégémonie s’affirme autour des thèmes les plus réactionnaires comme l’a montré la « Loi Darmanin »

 

Il est facile de comprendre que face à cette stratégie, ni la condamnation morale, ni le militantisme de proximité ne représentent les antidotes suffisants et efficaces. L’idéalisation du modèle républicain intégrateur, quant à elle, tourne vite très court. La République que l’on voudrait réponse, parade, contrepoison, se rétracte elle-même dans de nombreux cas, et tourne au « républicanisme ». Elle devient autoritaire, dure pour les faibles, elle menace et exclut sans générer de solidarités. Le refuge est dès lors le communautarisme érigé en substitut au pluralisme démocratique.
 

Il est clair que la question des pouvoirs et des libertés se trouve posée d’une manière nouvelle. Le devenir de nos sociétés est davantage déterminé par les choix des GAFAM, ces mastodontes des nouveaux services, que par l’État, l’économie sociale ou toute assemblée de citoyens.

 

Recréer un pouvoir collectif ne peut plus seulement consister d’un côté à miser sur un renforcement de l’intervention de l’État sur l’entreprise ou de l’autre à transformer le salarié en actionnaire.

 

La liberté du salarié, à partir de ses droits dans l’entreprise, devient la pierre angulaire d’une construction renouvelée de la liberté dans la société globale. C’est elle qui, fondamentalement, est capable de créer les conditions d’une extension réelle des libertés dans tous les domaines de la vie sociale.

 

Jean Christophe Le Digou

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