Pierre-Bénite un hommage politique émouvant à Missak et Mélinée Manouchian

Publié le par Les communistes de Pierre Bénite

 

Une soixantaine de militants et personnes ont participé à l'initiative de la section du PCF de Pierre-Bénite ce samedi 30 mars pour rendre hommage à Missak et Mélinée Manouchian et célébrer le 80ème anniversaire du programme du Comité National de la Résistance (CNR). Jean Chambon secrétaire de la section a ouvert l'initiative avec l'introduction que nous reproduisons ci-dessous.

 

Il a remercié chaleureusement les participants, les organisations présentes, Maud Millier pour la CGT et Michel Katchadourian pour le PCF qui sont intervenus et ont répondu aux questions.

 

Notre section rend hommage à Mélinée et Missak Manouchian, et avec eux aux 22 camarades étrangers et communistes fusillés par les nazis le 21 février 1944 au Mont Valérien, aux forces de la Main d’Oeuvre Immigrée qui participèrent à la Résistance à l’occupant et à la libération de la France.

 

Je remercie Simon Farriol, jeune peintre Chilien qui a accepté de peindre ce portrait de Missak Manouchian. Je vous demande de l'applaudir.

 

Portraint de Missak Manouchian

réalisé par Simon Farriol

 

Nous rendons hommage également à tous les martyrs de la Résistance morts pour la France. Nombre d’entre eux déportés ne revinrent pas des camps de la mort, beaucoup moururent sous la torture, fusillés ou décapités par les nazis ou les collaborateurs. Parmi elles et eux, de nombreux dirigeants de la CGT et de très nombreux communistes.

 

Nous avons en mémoire les 27 fusillés de Chateaubriand comme les nombreux cheminots qui s’impliquèrent dans la résistance, je pense à Marius Chardon des Ateliers d’Oullins assassiné en août 1944, à Pierre Sémard secrétaire de la Fédération des cheminots CGT, fusillé le 7 mars 1942, et aux 212 cheminots de notre région morts pour la France.

 

Toutes ces femmes, tous ces hommes, résistantes et résistants, sont morts pour la France et pour la liberté alors que le régime de Pétain collaborait avec l’Allemagne d’Hitler au service du capital, fidèle à sa devise « plutôt Hitler que le Front populaire ». Dans un discours d'octobre 1941, Pétain dénonce les résistants auteurs d'attentats et enjoint aux Français de se dresser contre eux en les poussant à la délation. Il propose de livrer lui-même aux Allemands les otages. C'est finalement le tristement célèbre Pierre Pucheu négociera avec les forces allemandes d’occupation.

 

Jean Chambon pendant son introduction

 

Pendant ces sombres années, la Résistance du affronter l'occupant nazi et le régime de Vichy tout en vivant dans la clandestinité. On imagine, le courage, la détermination, la force de conviction qu’il a fallu aux femmes et aux hommes de la résistance pour s’engager et agir. La liberté, la libération de la France les motivaient. Et beaucoup d'entre-eux voyaient plus loin, pensaient au monde d’après. Un monde à reconstruire sur d'autres bases avec la paix , la justice sociale, la démocratie, l’égalité comme moteurs contre la loi du profit.

 

Mélinée et Missak Manouchian étaient de ceux la. Ils sont entrés au Panthéon, le 21 février dernier. Ce jour là, la Résistance communiste a été officiellement reconnue. Une injustice a été réparée. Deux résistants communistes seront enfin présents au Panthéon.

 

Lors des cérémonies de février, la mémoire a été ravivée pour des centaines de milliers de personnes. Une partie de l’histoire de France a été découverte pour des millions d’autres. L’érudition nationale s’est renforcée et cela ne peut être sans conséquence. Au moment où se déchaînent la xénophobie, le racisme et les phantasmes sur la « France aux Français », la trajectoire de Missak Manouchian remet les pendules à l’heure. A l’émerveillement de tous, un immigré qui revendique, se syndique, se bat, entre au Panthéon. Pire : un immigré communiste vient d’être honoré en emportant par la force de sa vie et de son engagement l’admiration générale. 

 

Ne laissons pas retomber la poussière sur le portrait de cet éclatant communiste que tant de nos concitoyens découvrent et qui parle tant pour aujourd’hui. Des graines ont été semées, la curiosité s’est avivée, il faut y répondre c'est notre devoir.

 

Missak Manouchian est un rescapé du génocide arménien. Il arrive en France à 18ans. Après avoir travaillé aux chantiers de la Seyne sur mer, il rejoint Paris où il va travailler chez Citroën. En 1934, il rejoint le parti communiste et s'engage dans le comité de secours pour l'Arménie. Il poursuivra son engagement militant et antifasciste sous l'occupation en rejoignant la résistance armée au sein de laquelle il devient un des dirigeants des FTP-MOI de la région parisienne.

 

Après des mois de filatures des services de Vichy, son réseau tombe en novembre 1943. Livrés aux allemands, les 23 membres du groupe Manouchian sont condamnés à mort à l'issue d'un procès à grand spectacle au cours duquel les Allemands vont placarder dans les rues l' « Affiche rouge », devenue célèbre avec le poème d'Aragon reprise en chanson par Léo Ferré, avec les portraits des « terroristes ». L'odieuse campagne antisémite, xénophobe et anticommuniste se retournera contre ses auteurs.

 

L'exposition mise en place ce matin par Michel Katchadourian, est consacrée aux vies et engagements de Mélinée et Missak Manouchian ainsi qu'à ceux des martyrs de l'Affiche rouge, des FTP MOI leurs compagnons de combat. Trois livres vous sont aussi proposés : celui de Gérard Streiff « Un couple en résistance » sur la vie du couple Manouchian, le livre des cheminots consacré à leurs 212 camarades de la région morts pour la France. Enfin, le programme du CNR préfacé par Sophie Binet.

 

L'exposition sur Missak Manouchian

 

En effet, il y a 80 ans, était adopté le programme les « Jours Heureux ». L’unanimité des membres du CNR, marque une volonté commune de libérer la France et de la reconstruire en jetant les bases d’une société nouvelle. C’est l’exigence de la France résistante exprimée dans « les maquis » et dans les rencontres clandestines des militants.

 

Avec ce programme, c’est un idéal, une vision et un changement radical de la France qui émergent. En son cœur, la dignité de chacune et de chacun, la solidarité et la mise en commun des richesses du pays pour le reconstruire et le développer.

 

Vincent Rosati intervient...

 

Le programme du Conseil National de la Résistance est un édifice démocratique, économique et social qui a constitué depuis la Libération les bases de notre société. L'ancrage populaire des mesures prises à la Libération a été un puissant frein au travail de sape engagé par le patronat et les forces réactionnaires. A l'époque, la force de la CGT dans le monde du travail et celui du Parti Communiste au plan politique ont été à la fois des garde-fous à ces manœuvres destructrices et des points d'appui formidables pour la mise en œuvre du programme du CNR.

 

Un public attentif et curieux...

 

Dès la libération, l’un des piliers du programme est porté par Ambroise Croizat ministre du travail et de la Sécurité Sociale. Nous sommes fiers aujourd'hui de pouvoir célébrer ce 80ème anniversaire dans ce Foyer dont le nom est celui d'Ambroise Croizat.

 

Nous tenons à remercier le maire communiste de la ville Jean Marie Mick et son équipe municipale qui ont eu à cœur de l'appeler ainsi, comme ils ont eu à cœur d'appeler Benoît Frachon notre Centre de Santé, comme plus tard Mireille Domenech Diana également maire communiste aura à cœur de nommer Lucie Aubrac une de nos rues.

 

Tous les deux ont ainsi rendu hommage à ces femmes et ces hommes qui ont joué un rôle décisif dans la résistance, pour l'unification des différentes forces de la Résistance, des syndicats et des partis politiques dans leur diversité au sein du CNR qui constitue une exception que l'on ne retrouve nulle part ailleurs en Europe.

 

Concernant l'élaboration du programme du CNR, la 1ère partie traite de la mobilisation contre l'occupant et vise l'insurrection nationale. La seconde partie traite des mesures économiques et sociales à appliquer dès la Libération, c'est la charte de la Résistance proposée par Pierre Villon du Front national de lutte pour l'indépendance de la France qui servira de base définitive aux programme « les jours heureux ». Ne cachons pas que les orientations proposées ont fait débat, mais les différences s'effaceront devant la volonté partagée de libérer le pays et d'ouvrir un chemin à une nouvelle société faite par les humains et pour les humains.

 

Intervention de Roger Tarrago

 

Ce programme a l’ambition « d’un plan complet de Sécurité Sociale assurant à tous les citoyens, des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail » avec l’invention du système solidaire intergénérationnel : « cotiser selon ses moyens et recevoir selon ses besoins » pour la santé, la retraite et les familles. Est ainsi créé la cotisation sociale qui en étant prélevée sur les richesses créées constitue le cœur politique du financement de la solidarité. Les nationalisations donnent au pays les capacités à se relever. Et des droits nouveaux permettent aux travailleurs de se mêler des choix de gestion de leur entreprise !

 

C’est ainsi une France ruinée qui jette les fondements de l’État providence et d’une société où l’intérêt particulier cède devant l’intérêt général. Après la Sécurité Sociale sera instaurée l'assurance chômage aujourd'hui dans le collimateur des forces réactionnaires.

 

Roger Gay lors de son intervention

 

Depuis 1946, le capital et le patronat combattent ce programme. Ils ne supportent pas qu’une partie des richesses soit utilisée pour financer la santé, les retraites, le progrès social, le développement.  Ces attaques, qu’elles viennent des collaborateurs d’hier ou de ceux qui aujourd’hui détricotent les acquis sociaux, appellent la mobilisation de notre peuple. Comme toujours, ensemble, nous devons nous réapproprier, défendre pour améliorer et poursuivre l’histoire d’un monde de progrès.

 

En ce sens, exiger le « 100 % Sécu » pour pousser l’œuvre d'Ambroise Croizat et la compléter avec une Sécurité d’Emploi et de Formation pour dépasser le marché du travail capitaliste en garantissant à chacune et chacun l’emploi ou la formation tout au long de sa vie professionnelle et dans la liberté de choisir son emploi, sa formation et sa mobilité professionnelle, contribuent à faire vivre les valeurs et concepts mis en œuvre par ceux qui surent se rassembler pour reconstruire la France à la Libération.

 

Une personne d'origine arménienne intervient...

 

Notre initiative de ce jour, n'a pas pour ambition la nostalgie, elle a pour intérêt de mieux connaître notre histoire, celle du CNR et de son programme installé dans le contexte de l'époque en rappelant ce que furent les rôles de la CGT et du Parti Communiste.

 

Nous sommes utiles alors pour faire apprécier aux militants d'aujourd'hui et aux jeunes générations le niveau de conscience politique et morale des ces résistants de l'ombre qui ont su dépasser leurs différences pour s'unir, conquérir et commencer à installer une République démocratique et sociale.

 

J'en termine avec cette introduction, je laisse à Maud Millier et à Michel Katchadourian que je remercie de leur participation, le soin de compléter, de préciser et de pousser quelques idées en lien avec l'actualité.

 

Intervention de Maud Millier pour la CGT

 

Au travers l'hommage que nous rendons à ces femmes et ces femmes, c'est bien le rôle déterminant qu'a joué la classe ouvrière dans la lutte contre la barbarie nazie qui est salué, eux qui ont incarné le courage et la liberté, de ceux qui ont lutté jusqu'à la mort contre l'oppression et l'exploitation. À l’heure où sont attisées les braises de la haine et du fascisme, il est primordial de prendre le temps du souvenir et de la commémoration pour poursuivre leurs luttes héroïques, menées sans relâche.


Leurs héritages et leurs combats sont plus que précieux dans la France d’aujourd’hui où la bête immonde tente de ressurgir. La CGT est, hier comme aujourd’hui, pleinement engagée dans la lutte contre les idées d’extrême droite, et contre toutes les formes de haine et de discrimination.

 

Maud Millier intervient pour la CGT

 

Dans un monde de guerres, où le capital attise les conflits en fonction de ses intérêts, le syndicalisme CGT défend la paix et l’intérêt des travailleuses et travailleurs. Le monde tremble du fait des crises et des guerres. Le libéralisme provoque un monde de chaos. La liste des théâtres de guerres dans le monde est beaucoup, beaucoup, trop longue.

 

Jamais l’humanité n’a, autant qu’aujourd’hui, disposé de moyens pour résoudre ces problèmes et créer les conditions pour que chaque être humain puisse vivre en paix et en sécurité. Pourtant la réalité du monde est tout autre.

 

Et la principale cause de cette situation en revient au mode de production capitaliste. La recherche du profit à tout prix et la volonté des puissants de contrôler les richesses de la planète, entretiennent la course aux armements. Le commerce des armes pérennise le sous-développement et alimente les tensions sur le globe. Aussi la politique actuelle de la France prend toute sa place dans cette stratégie guerrière libérale, en tant que troisième marchand d’armes dans le monde.

 

Dans ce contexte nourri par la désespérance sociale, il y a contagion sur toute la planète de l’extrême droite raciste, antisémite ; liberticide sur les questions démocratiques et ultralibérale sur les questions sociales.

 

 

La banalisation de l’extrême droite et de ses idées mortifères, est devenue une réalité, en particulier dans les milieux politiques et médiatiques, provoquée par l’instrumentalisation de la précarité et l’absence de réponse aux besoins des travailleurs. Le vote récent de la loi asile immigration (la 29ème depuis 1980) en est l’une des tristes illustrations.

 

La paupérisation des travailleurs organisée par le gouvernement Macron est un boulevard pour l’extrême droite. En ce sens, les batailles revendicatives menées par la CGT pour des augmentations de salaires, l’égalité salariale femmes-hommes, la défense du système solidaire de retraite, sont autant de poings levées contre l’extrême droite.

 

Il est important de rappeler que l’extrême droite est le pire ennemi du monde du travail et qu’elle est financée par le capital. Nous sommes les garants d’un monde du travail soucieux des humains et de la planète, pour ne pas transformer notre pays des droits de l’homme en une fâcheuse et terrible tragédie.

 

La montée sans précédent des partis d’extrême droite dans toute l’Europe, dans des sociétés occidentales dites progressistes, comme en Italie, au Portugal ou en Espagne, est la conséquence des politiques d’austérité menées, et d’un grave danger pour la démocratie. Ce sont aussi ces mêmes politiques qui sont à la source des conflits qui se multiplient dans le monde et qui attisent la haine.

 

 

A quelques semaines maintenant des élections européennes, nous nous devons d’être optimistes, combatifs et éclairés, faire vivre nos valeurs fondamentales et apporter l’espoir. Rien n’est jamais écrit d’avance et la CGT (comme le parti communiste) peut renverser des montagnes, comme l’histoire nous l’enseigne. Et c’est pourquoi nous saluons aujourd’hui, celles et ceux qui y ont contribué.

 

Cette année nous fêtons également les 80 ans du conseil national de la résistance, qui a donné naissance à de nombreux progrès, visant à ce que chacun puisse vivre dans la dignité, tout au long de sa vie. Des cendres du nazisme et de la barbarie de la seconde guerre mondiale est né une ambition révolutionnaire, celle de permettre à tout à chacun de vivre dans une société libre, égalitaire et fraternelle. Travaillé dans la résistance syndicale et politique, le programme du conseil national de la résistance a été pour des générations et des générations le garde-fou d’un monde hanté par ses dérives capitalistes.

 

Mise en place de la sécurité sociale, Nationalisations du gaz et de l’électricité, pour ne citer que ces deux exemples lourds de symbole et de sens. L’esprit du CNR étant « chacun selon ses moyens, chacun selon des besoins » et l’assurance d’un traitement solidaire et égalitaire quelque soit le revenu, la classe sociale etc… et ce tout au long de la vie. En fêter les 80 ans, ce n’est pas être nostalgique, c’est au contraire, faire vivre tout l’optimisme et l’espoir qui ont animé nos camarades fondateurs afin que nous trouvions dans notre force collective la capacité de nous réapproprier, pour nous et les générations à venir, le contenu et l’essence de ce programme révolutionnaire.

 

Nous devons mettre au même niveau, nos luttes contre l’exploitation capitaliste et celles contre les rapports de domination qu’elles soient sexistes ou racistes, sans minorer les uns par rapport aux autres.

 

Résister est un combat d’actualité. Un verbe qui se conjugue au présent comme le disait Lucie Aubrac. Toutes et tous ensemble, faisons vivre la solidarité, pour que vive l’égalité, pour des jours heureux, dans un monde paix ! Vive la lutte et vive la liberté !

 

Michel Katchadourian pendant son intervention

 

Intervention de Michel Katchadourian

 

L'histoire est un formidable instrument de compréhension et par conséquent de liberté. C'est un outil qui permet de lire l'actualité de façon critique à la condition de transposer des situations sociales, politiques, historiques, différentes.

 

Missak est né le 1er septembre 1906 dans une famille arménienne à Adiyaman, village à l'est de l'actuelle Turquie. Ses parents figurent parmi les victimes du génocide perpétré en 1915 par le pouvoir ottoman contre les arméniens et qui fera près de 1,5 million de morts. Avec son frère, il est réfugié dans un orphelinat au Liban à l'époque sous mandat français. Il apprend le métier de menuisier, se consacre à la lecture d'ouvrages français et à l'écriture poétique avec comme inspiration Victor Hugo.

 

Arrivé en France en 1924, après avoir exercé son métier de menuisier, il entre aux chantiers navals de la Seyne-sur-mer. Il part pour Paris et est embauché comme tourneur aux usines Citroën. Mais la crise provoque son licenciement. Passionné par la littérature arménienne et française, il fréquente les bibliothèques, suit des cours à la Sorbonne et fonde une revue littéraire. Il demande sa naturalisation en 1933. Mais cette première demande reste sans suite, sans doute parce que Missak est étranger et en plus au chômage !

 

Il adhère au Parti Communiste Français, au lendemain de la manifestation du 6 février 1934 menées par les ligues d'extrême droite. Il rejoint également la section française du comité de secours de l'Arménie, une organisation liée à l'Internationale communiste visant à mobiliser la diaspora arménienne en faveur de la République soviétique d'Arménie. Cela lui donne une place importante au sein de la communauté arménienne réfugiée en France. Il y rencontre Mélinée Soukémian, devenue Assadourian à son arrivée en France à la suite d'une erreur d'état-civil, dont les parents ont également péri dans le génocide. Ils se marient en 1936. Missak et Mélinée sont des apatrides munis du "passeport Nansen" premier instrument juridique de protection des réfugiés mis en place après la 1ère guerre mondiale.

 

A la déclaration de guerre en 1939, Missak est arrêté et emprisonné. Son statut d'apatride et son engagement communiste le placent dans la catégorie des "Indésirables" que le gouvernement Daladier veut voir interner. Pour obtenir sa libération, il s'engage dans l'armée française. Il renouvelle sa demande de naturalisation en 1940 mais elle est à nouveau refusée.

 

En juin 1941, il est interné au camp de Royallieu à Compiègne par les allemands qui procèdent à des arrestations préventives des communistes dans le contexte de l'opération Barbarossa. Libéré faute de charges, il reprend son activité militante et intègre la Main d'Oeuvre Immigrée (MOI) créée par le Parti Communiste pour encadrer les immigrés et les réfugiés arrivés en France dès la fin de la 1ère guerre mondiale.

 

Il devient sous le pseudonyme de "Georges" le responsable politique de la section arménienne, entre la fin 1941 et le début 1942. En février 1943, il rejoins l'organisation clandestine Francs-Tireurs Partisans - Main d'Oeuvre Immigrée (FTP-MOI) alors seul groupe résistant à mener des actions de lutte armée contre l'occupant. Nommé commissaire militaire de la région parisienne en août 1943, il a sous ses ordres une cinquantaine de militants. Les groupes de Manouchian mènent plus d'une centaine d'opérations armées dont l'attentat contre le général Ritter responsable en France du Service du travail Obligatoire (STO).

 

Missak Manouchian est arrêté le 16 novembre 1943 par les brigades spéciales de la police française après une filature de plusieurs mois, alors qu'il rencontre Joseph Epstein le chef interrégional des FTP-MOI. Dans les jours qui suivent, les groupes des FTP-MOI sont massivement arrêtés et livrés aux allemands.

 

L'affiche rouge...

 

Les autorités d'occupation allemande organisent en février 1944 un procès très médiatisé, notamment avec l'Affiche rouge, affiche xénophobe et antisémite qui vise à décrédibiliser l'action de ces résistants étrangers. Mais le placardage de plusieurs milliers d'exemplaires de cette affiche dans Paris occupé et la distribution en milliers d'exemplaires d'un tract les qualifiant "d'armée du crime" va produire l'effet inverse. Loin de provoquer peurs et condamnations, elle éveille plutôt des manifestations de sympathie dans une partie de l'opinion publique. Cette affiche devient l'emblème de l'héroïsme et du courage des hommes et des femmes qui ont sacrifié leur vie pour libérer la France.

 

Missak Manouchian est condamné à mort le 19 février 1944 avec 22 de ses camarades. Les hommes sont fusillés le 21 février au Mont Valérien. Olga Bancic est quant à elle déportée et guillotinée en Allemagne.

 

Missak interné à la prison de Fresnes, adresse sa dernière lettre à Mélinée, qu'il signe Michel preuve de son attachement à la France son pays d'accueil. Il s'y considère comme un soldat tombant pour la France tout en affirmant "n'avoir aucune haine contre le peuple allemand".

 

Laurent Aubeleau responsable CGT des Cheminots de Lyon

 

Honorer la mémoire de Pierre Sémard, de Marius Chardon ou pour d’autres camarades plus anonymes revêt une dimension particulière aujourd’hui alors que nous célébrons le 80ème anniversaire du programme du Conseil National de la Résistance, « Les Jours Heureux ». 80 ans, c’est si peu à l’échelle de l’Histoire et pourtant, mesurons à quel point, dans une si courte période, certains repères pourraient aisément s’effacer si nous n’étions pas suffisamment attentifs.

 

C’est le sens du livre qui raconte l’histoire de 212 cheminots des départements de l’Ardèche, la Drôme, le Jura, la Loire, l’Isère, la Saône et Loire et du Rhône tués, victimes de la répression et des combats pour la libération du pays. Cet ouvrage détaille leur implication dans les réseaux de résistance, les maquis, leur engagement dans les partis politiques, les syndicats.

 

Ces cheminots ayant tout donné jusqu’à leur vie, se répartissent ainsi, 67 fusillés, 53 déportés politiques qui ne reviendront pas des camps de la mort, 27 tués dans les combats des maquis, 28 au cours de représailles, 12 dans les combats pour la libération définitive de la région, 9 ayant rejoints les Forces Françaises libres, 7 assassinés par les nazis ou la milice, 5 pour raisons politiques et 4 déportés israélites.

 

Ce livre est le résultat d’un vaste chantier de recherches concernant la période 1939/1945, travail opéré depuis 2015 sur ces départements. C’est un ouvrage collectif produit par le Secteur Fédéral CGT des Cheminots de la région de Lyon et de son Institut d’Histoire Sociale.

 

Il ne s’agit pas aujourd’hui de faire un simple rappel historique pour éviter que certaines pages de notre histoire contemporaines tombent dans l’oubli, même si ce devoir de mémoire est indispensable. Il s’agit de faire en sorte que ceux qui, comme Pierre SEMARD et tous ses compagnons, morts pour défendre nos idéaux, nous servent de guides et de prolonger leur combat. C’était la volonté de Pierre SEMARD par exemple et c’est le message qu’il a transmis aux cheminots quelques heures avant de tomber sous les balles nazies.

 

Que disait leurs opposants à cette époque ?  « Les congés payés, la réduction du temps de travail, la protection sociale solidaire et les conventions collectives, la redistribution des richesses produites sont des facteurs qui vont ruiner les entreprises et faire s’effondrer l’économie nationale. » « Les entreprises publiques, les services publics, les statuts protecteurs de leurs salariés, sont autant d’éléments insupportables pour les finances de l’État. »

 

Alors qu’ils n’ont jamais cessé de faire gonfler leur fortune, ce sont les mêmes qui, aujourd’hui, nous assènent des discours identiques, arguant de la mondialisation de l’économie, du libéralisme exacerbé ou de la concurrence libre et non faussée, présentés comme autant de dogmes.

 

Certains dirigeants politiques, capables de trouver en quelques jours des milliers de milliards d’euros et de dollars pour sauver les banques de leur démence spéculative, entendent maintenant se servir de la situation comme une opportunité pour faire payer les salariés en gravant dans les textes constitutionnels la régression sociale.

 

Les batailles menées par la CGT pour reconquérir des services publics efficaces, celle que nous menons âprement à la SNCF à l’appui de luttes allant du local au national, nourries de propositions, de projets complets tant pour le transport de marchandises que voyageurs, illustrent bien notre force de conviction, notre abnégation pour permettre aux services publics (de l’hôpital, de l’énergie, des transports, de l’éducation, des télécommunications, etc.) de redevenir les outils publics répondant aux besoins des populations, de l’intérêt général.

 

Rendre hommage à tous ces résistants doit se traduire par notre engagement sans faille contre les puissances financières et patronales, contre les forces politiques à leur solde. Faire en sorte de poursuivre leur œuvre, cela nécessite de nous inscrire avec toute notre énergie dans la défense et le développement des services publics, de consolider et d’améliorer le cadre social et les conditions de vie et de travail des salariés, d’amplifier nos batailles sur l’emploi et les salaires.

 

Ces hommes sont parvenus, dans une époque beaucoup plus difficile, à élever les consciences, à gagner des conquêtes sociales qui nous servent encore de bases revendicatives, à mener la bataille idéologique dans un contexte bien plus hostile. Alors, responsables et résolus, comme eux rien ne doit nous faire douter, rien ne pourra nous arrêter car notre combat se place dans le prolongement du leur.

 

De plus, nous disons que le devoir de mémoire est insuffisant s’il ne s’accompagne pas d’une démarche volontariste pour défendre nos valeurs, nous savons que la bête immonde prend quelques fois des visages humains pour convaincre ceux qui sont dans la misère que de plus malheureux qu’eux en sont les responsables. Nous devons être très attentifs !

 

La perte de repères historiques et politiques conduit à des dérives graves et il est de notre devoir d’être très fermes sur ces questions et ne pas avoir la main qui tremble. La mémoire est aussi un domaine de luttes. Elle fait partie intégrante de la bataille des idées.

 

Un public attentif...

 

Après les différentes interventions de la salle, Daniel Deleaz a lu la lettre de Missak à Mélinée écrite quelques heures avant sa mort. La salle observa ensuite une minute de silence et écouta "l'Affiche rouge" le poème d'Aragon chanté par Léo Ferré. Voir le lien ci-dessous.

 

https://www.youtube.com/watch?v=SFt2v4OSTbU

 

Un pot fraternel fut enfin offert par notre section à l'ensemble des participants.

 

Merci aux militantes et militants qui ont permis que cette initiative soit réussie.

 

Jean Chambon
 

 

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