Le monde bouge ! Mexique : l'élection d'Obrador bouscule la donne en Amérique latine !

Publié le par Front de Gauche de Pierre Bénite

Le monde bouge ! Mexique : l'élection d'Obrador bouscule la donne en Amérique latine !

Les élections mexicaines de dimanche ont été marquées par des violences jamais connues au Mexique durant une campagne électorale. Plus de 140 candidats, femmes et hommes politiques ont été assassinés.

Quelques jours après l’élection du nouveau Président de gauche, Andrés Manuel Lopez Obrador dit AMLO, quelle est l’atmosphère générale ?

L'arrivée au pouvoir d'un Président de gauche au Mexique est un séisme politique. Malgré cet évènement inédit depuis des décennies, Mexico n'était pas plus agitée qu'à l'habitude. Il y avait même une impression de calme après la tempête après la tempête de dimanche.

AMLO, a basé l'essentiel de sa campagne sur un programme anti-système et anti-corruption. Agé de 64 ans, le candidat des classes populaires a promis d'enrayer la corruption et de réduire le pouvoir des organisations criminelles. Durant la campagne, le Président a aussi déclaré qu'il s'entretiendrait avec son homologue américain, Donald Trump, pour annuler la construction du mur à la frontière américano-mexicaine.

Dans une lettre publiée dans Le Monde diplomatique en avril 2017, Lopez Obrador écrivait:

«Nous nous fixons deux tâches prioritaires: convaincre les Américains qu'ils sont les victimes d'un discours démagogique visant à leur faire oublier l'ampleur de la crise économique; et expliquer aux Mexicains l'importance du travail qu'ils accomplissent de l'autre côté de la frontière.»

En avril 2018, AMLO a fait part de son intention de ne pas emménager, une fois élu,. une résidence luxueuse de la présidence. Il a déclaré qu'il allait ouvrir au public le site du parc de Chapultepec, où se situe la résidence officielle, et consacrer le tout aux arts et à la culture. Une annonce symbolique qui visait à asseoir son image d'homme politique humble et modeste.

La stratégie du candidat de gauche semble donc avoir porté ses fruits auprès de l'électorat.

AMLO avec 54% devance le libéral Ricardo Anaya de plus de 30% et a battu Meade fidèle d'Enriqué Pena Nieto du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) ultralibéral fortement rejeté par la population.

Avec ses alliés, Lopez Obrador, qui prend ses fonctions en décembre, obtient une majorité à l’Assemblée, avec au moins 250 sièges de députés. Il s’agit d’un « ouragan national », a déclaré le politologue Jesus Silva Herzog Marquez.

Ce succès sans précédent au niveau national, est également un grand succès régional et local, en décrochant au moins six postes de gouverneurs sur les neuf en jeu, avec son parti, le Mouvement de régénération nationale (Morena). Et pour la première fois, une femme, Claudia Sheinbaum, scientifique de 56 ans et fidèle de « AMLO », sera à la tête de la ville-Etat de Mexico, qui compte plus de 20 millions d’habitants.

Lopez Obrador aura su capitaliser sur l’exaspération d’une grande partie des Mexicains, et se présenter en candidat humble et modeste, bien décidé à chasser « la mafia du pouvoir », incarnée par l’impopulaire président Enrique Peña Nieto.

Le problème de la violence endémique

Rappelons que 43 étudiants ont été assassinés en 2014 dans l'État du Guerrero, un incident qui est devenu emblématique de la montée de la violence autant celle du pouvoir grandissant des cartels de la drogue que celle des forces de police. Cette histoire tragique n'est pas entièrement résolu, mais la mort de ces étudiants est attribuée à des trafiquants de drogue. Depuis, la situation ne s'est guère améliorée. En 2017, plus de 25.000 homicides ont été enregistrés au Mexique, un record du nombre annuel d'assassinats en 20 ans.

«La violence au Mexique est un problème tellement grave qu'on ne sait pas comment le nouveau Président va s'y prendre pour faire revenir la paix», confie Fanny Verde, 23 ans, interrogée sur la célèbre place du Zocalo. L'étudiante en licence de biologie à l'Université autonome du Mexique a ajouté qu'elle avait décidé, à la dernière minute, de voter pour un autre candidat.

Aussi interrogé, Francis Langlois, un Québécois qui vit à Mexico depuis quelques années, se montre plutôt sceptique quant aux promesses d'AMLO. Selon lui, le programme social du nouveau Président ne suffira pas à mettre fin à la violence endémique, surtout celle des narcotrafiquants.

Saul Sanchez, psychologue social et professeur à l'Université Méxicoamericana du Golfe, est plus optimiste. Selon lui, AMLO est un homme politique sincère, qui représente un bon équilibre entre la gauche et la droite. Le professeur a également souligné que le problème de la violence au Mexique ne se réglerait pas par la militarisation du pays, mais par l'augmentation des revenus :

«Les salaires au Mexique demeurent, en moyenne, dans les plus bas en Amérique latine. Il faut favoriser le bien-être de la population pour mettre fin au pouvoir des cartels. Le nouveau Président semble l'avoir compris.»

Un vaste programme de «régénération nationale»

L'ancien maire de Mexico, qui s'était déjà présenté deux fois aux élections présidentielles, s'est fait élire avec un programme de «régénération nationale». Une formule-choc qui exprime beaucoup d'ambition. Le programme du Movimiento Regeneración Nacional (MORENA) explique toutefois la démarche du Président:

«MORENA lutte contre la corruption, le régime antidémocratique, les injustices et l'illégalité qui ont conduit le Mexique au déclin actuel, lequel se manifeste dans la crise économique et politique, la perte des valeurs, la décomposition sociale et la violence.»

Le programme du mouvement est résolument de gauche sur le plan économique. En matière sociale, il fait aussi la promotion d'une sorte de «multiculturalisme» à la mexicaine. En effet, les références au problème de la pauvreté et au caractère multiculturel du peuple mexicain sont nombreuses. Un programme qui, somme toute, peut faire écho à d'autres plateformes électorales de partis politiques de gauche en Occident.

Le programme prévoit aussi de mettre fin à la longue tradition d'autoritarisme qui sévit dans ce pays.

Andrés Manuel Lopez Obrador a d'ores et déjà marqué l'histoire du Mexique en portant la gauche au pouvoir. Maintenant, tous les yeux sont braqués sur lui et les attentes sont aussi élevées que nombreuses.

Les communistes se félicitent et apportent tout leur soutien à Andrés Manuel Lopez Obrador et à ses alliés pour cette victoire sans appel qui sera, sans nul doute, un point d’appui pour l’ensemble des progressistes de la région.

Publié dans Amérique Latine

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