Ecologie : Réflexion sur le droit à réparer et pour consommer autrement...

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Ecologie : Réflexion sur le droit à réparer et pour consommer autrement...

Nous portons à votre connaissance l'article d'Emile Meunier sur l’obsolescence programmée qui est un fléau environnemental.

En 2019 la lutte contre les fabricants d’objets qui vieillissent trop vite va s’intensifier. L’obsolescence ne se cache pas seulement dans nos ordinateurs et nos smartphones… les bas qui filent et qu’on jette à peine achetés en sont un autre exemple.

En France avec l'association HOP // Halte à l'Obsolescence Programmée des actions pénales ont été menées contre Apple et Epson. Les enquêtes sont encore en cours à la DGCCRF, mais elles devraient être clôturées prochainement.

En Italie, Apple a été condamnée pour "pratiques commerciales malhonnêtes" car la firme a mal intentionnellement ralenti ses iPhones à l'aide d'une mise à jour (les mêmes faits que ceux dénoncés en France).

Emile Meunier développe ses réflexions et actions ci-dessous.

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"Une planète trop petite ? Non, une humanité trop gourmande ?

Même si le problème est désormais connu de tous, il n’est jamais inutile de donner quelques chiffres. Trois planètes seraient nécessaires si l'humanité devait vivre comme nous, Européens. 2,5 tonnes ! C’est la matière première utilisée pour fabriquer une télévision de…11 kg, avec une consommation carbone équivalente à un aller-retour en avion Paris-Nice (La face cachée des objets, ADEME).

Malgré cela, chaque Français jette tous les ans plus de 20 kilos de déchets électroménagers. Ce qui représente 147 tours Eiffel mises bout à bout. Or, la moitié des appareils jetés pourraient être réparés. Les trois quarts des français jettent leurs produits électroménagers à cause d'un seul composant en panne. On comprend donc qu’en réparant on éviterait des millions de tonnes de déchets tous les ans et on préserverait des ressources indispensables aux générations futures.

En bref, la réparation des objets est une part importante de la solution pour résoudre la crise écologique.

Mais alors, pourquoi ne répare-t-on pas suffisamment ?

Les raisons sont multiples et souvent imbriquées.

  • Psychologique. L’acte d’achat est souvent compulsif et plusieurs décennies « glorieuses » nous ont fait croire qu’il fallait posséder pour s’épanouir. Et pourtant, rien n'est plus faux.
  • Esthétique. Bien souvent dans l’entreprise, le designer a pris le dessus sur l’ingénieur. Alors que ce dernier va privilégier la fonctionnalité, le premier va privilégier l’esthétisme et le design. Les arbitrages internes vont en sa faveur. C’est ainsi qu’on se retrouve avec des appareils conçus d’un seul tenant, certes très beaux mais au détriment de leur réparabilité. La Surface Laptop de Microsoft a été qualifiée par le site de tutoriels de réparation iFixit de "monstruosité remplie de colle", et donc irréparable. En effet, elle ne peut "littéralement pas être ouverte sans être cassée", car les composants sont "cachés sous des points de soudure adhésifs et plastiques".
  • Technique. La miniaturisation et la complexification des objets font souvent obstacles à une réparation facile et peu couteuse.
  • Économique. Les fabricants rechignent à fabriquer et stocker les pièces détachées nécessaires. La logistique pour les acheminer est un coût supplémentaire qu’ils souhaitent bien souvent s’épargner.
  • Commerciale. La baisse du prix de l’électroménager a rendu les appareils le plus souvent irréparables. En rognant sur les coûts de production (main d’œuvre, matériaux, etc.), les industriels ont certes fabriqué des produits à bas coût et accessibles au plus grand nombre, mais ils ont, dans le même temps, réduit la qualité et la durabilité de leur produit. Le bon côté, c’est que cela a permis d’équiper des familles entières à moindre prix, qui jusque-là n’en avait pas forcément les moyens. Néanmoins, sur le long terme, cela représente un vrai coût pour la société : la qualité a baissé, on ne fabrique plus de pièces détachées, et on éco-conçoit mal le bien.
  • Informationnel. Souvent les consommateurs sont très mal informés des caractéristiques du produit. Est-ce qu'il existe des pièces détachées disponibles (une loi existe pour informer le consommateur mais elle a été vidée de sa substance par l'interprétation du gouvernement et du Conseil d'Etat) ? Existe-il des outils ou des plans pour réparer ? Quelles statistiques de panne ? Même la durée de garantie est souvent fausse ou difficile d'accès. Les clients font ainsi face à une véritable asymétrie d'information puisque les fabricants connaissent, eux, précisément les caractéristiques de leurs appareils, leur durée de vie moyenne et leur taux de retour à la suite d'une panne. 
  • Malintentionnée. Nombreux sont les fabricants qui mettent des obstacles à la réparation indépendante ou à l'auto-réparation. Refuser de fournir les plans de réparations et les outils, bloquer volontairement les appareils qui ont été réparés ailleurs que chez eux, autant de comportements répandus chez les fabricants afin de garder captif le client à tout moment de la vie du produit. On l’a vu chez Apple où lorsqu’on changeait le bouton principal chez un réparateur non-agréé, l’iPhone affichait l’erreur 53 et se bloquait. La tentation peut être rencontrée également chez les constructeurs automobiles qui souhaiteraient ainsi garder la main sur le juteux marché de l’after-market (réparation et pièces détachées) au détriment d’une concurrence libre des consommateurs. Certains fabricants, moins nombreux, pensent qu’en organisant l’obsolescence programmée de leurs produits, ils renouvelleront plus souvent l’acte d’achat des consommateurs. C’est le cas par exemple pour Epson qui diminue volontairement la durée de vie de ses cartouches – les affichant artificiellement comme vides, alors qu’elles ne le sont pas – afin de forcer le client à en racheter plus souvent.

La conséquence est le renchérissement du coût de la réparation. Trop souvent, il est moins cher de jeter et de racheter neuf plutôt que réparer. Or, il a été démontré pour le cas de l’électroménager que les consommateurs favorisent la réparation lorsque celle-ci n’excède pas 30 % à 50 % du prix du produit neuf.

Alors comment rendre la réparation moins coûteuse ?

Nous sommes nombreux à demander une « Loi Réparation » qui viendrait lever les obstacles évoqués ci-dessus avec des mesures ciblées. Je propose plusieurs actions dans une série d'articles à venir, mais précisons que je n'ai rien inventé. Les mesures sont issues de mes échanges avec de nombreuses associations, entreprises et experts.

L’objectif politique de cette Loi Réparation est simple : réparer doit coûter moins cher que jeter et racheter du neuf. Elle doit reposer sur plusieurs moyens d'actions.

  1. Affirmer un droit à réparer et libéraliser le marché de la réparation
  2. Orienter le consommateur vers des biens facilement réparables 
  3. Soutenir le secteur de la réparation par une fiscalité favorable 
  4. Améliorer le contrôle et la sanction des fabricants qui ne jouent pas le jeu en confiant cette mission à des organismes privés.

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