Europe : conflits d'intérêts à Bruxelles, Thierry Breton va t-il s'en sortir ?

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Europe : conflits d'intérêts à Bruxelles, Thierry Breton va t-il s'en sortir ?
Thierry Breton, tente ce jeudi 14 novembre de convaincre les eurodéputés de valider sa candidature comme commissaire européen. S'il peut compter sur l'indulgence des conservateurs, il n'a pas dissipé les interrogations sur ses conflits d'intérêts. Après la claque avec le rejet de Sylvie Goulard, Macron va -il à nouveau connaître un revers?
 
Avec une voix d'avance, Thierry Breton savoure son premier succès, après la validation de sa candidature au poste de commissaire européen par les eurodéputés de la commission juridique. Pour elle, la nomination de l'industriel ne poserait pas de problème particulier de conflit d'intérêts. Pour autant, rien n'est gagné. Comme lui, Sylvie Goulard avait passé cette première étape avec succès avant d'échouer sur le second obstacle, celui de l'audition au fond. Le nouveau candidat pour le portefeuille pléthorique du marché intérieur, de l'espace, de la défense, et du numérique doit justement répondre aux questions des représentants des commissions concernées.

L'étape est périlleuse, avant tout en raison des règles en vigueur. Pour être définitivement désigné commissaire européen français, Thierry Breton devra réunir le vote positif des deux tiers des eurodéputés des commissions concernées (marché intérieur, industrie, justice, éducation et culture).

L'ex-PDG d'Atos est pour l'heure loin du compte. Dans le cas contraire, il devra répondre à des questions écrites, avant une éventuelle dernière audition couperet.

La gauche, en particulier, demeure très réservée, en raison des nombreux liens entre son portefeuille et ses fonctions passées. S'il était choisi, l'industriel devrait ainsi gérer les programmes européennes concernant l'intelligence artificielle, les ordinateurs supercalculateurs (les machines les plus puissantes du monde) ou encore la cybersécurité, soit trois des spécialités… d'Atos, la multinationale française du Cac 40 dirigée pendant dix ans et jusqu'en octobre dernier par l'ex-ministre de l'Economie.

Thierry Breton promet qu'il se "récusera automatiquement de toute décision de gestion financière, contractuelle ou similaire qui concernerait directement Atos ou l'une de ses entités".

Une manière de court-circuiter les critiques… et de préserver l'intégralité de son portefeuille. Au sein du groupe social-démocrate, une députée évoque ainsi la possibilité de demander à l'industriel de ne pas toucher aux questions numériques : "Je vois mal comment il pourrait garder la main sur ces sujets : Atos est présent dans chaque dossier ou presque". Atos est en effet rien moins que le leader européen de tout ce qui touche aux technologies numériques.

Un proche de la commission européenne résume : "Atos est une entreprise systémique en Europe, dans le numérique à proprement parler, mais aussi sur l'espace et la défense, donc même sans le faire exprès, Thierry Breton l'avantagera. Au fond, tout dépend de la philosophie qu'on retient d'un conflit d'intérêts".

Bonne nouvelle pour l'ex-PDG, une partie des députés européens, particulièrement à droite, lui manifestent une certaine indulgence. Ils lui font gré d'avoir pris au sérieux le sujet des conflits d'intérêts. En trois semaines, Thierry Breton a en effet renoncé à ses postes d'administrateur des sociétés Carrefour, Bank of America, Sonatel, Wordline. Il a aussi vendu l'ensemble de ses actions Atos, pour un montant qui pourrait avoisiner les 35 millions d'euros, selon le cours actuel de la bourse.

Dans sa déclaration d'intérêts, l'intéressé précise qu'il ne préside pas la fondation chargée de représenter les intérêts du milliardaire Bernard Arnault à son décès, comme cela a été évoqué dans la presse, car celle-ci n'a "jamais été mise en place".

Surtout, plusieurs eurodéputés hésitent encore à entrer dans un engrenage qui pourrait aboutir… à la chute de la commission Von der Leyen, avant même son entrée en fonctions.

"Si Thierry Breton est refusé, Von der Leyen saute ensuite, et c'est un tremblement de terre que beaucoup ne sont pas prêt à risquer", décrypte un député européen PPE. Un autre élu du même groupe craint que la manœuvre ne retombe au final sur les conservateurs : "Si Thierry Breton livre une bonne prestation et qu'on le renverse, on passera pour des hargneux. Ce n'est pas le but…"

Pour s'éviter un destin à la Goulard, l'ex-grand patron devra déjà convaincre sur le fond.

Sources Marianne

Publié dans Europe, Finances-riches

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