Les métallos ne sont pas contents de l'UIMM et lui disent haut et fort !

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Manifestation de 7000 métallos le 25 novembre devant l'UIMM

Manifestation de 7000 métallos le 25 novembre devant l'UIMM

Le 14 décembre se tenait une séance de négociation conclusive avec l'UIMM. En cette occasion la FTM CGT a fait la déclaration suivante :

"Cette négociation a démarré début 2016, elle a été précédée de 2 années de pré-négociation. Négociation dans laquelle la FTM CGT s’est engagée pour obtenir une convention collective nationale de progrès social digne du 21 siècle.

Cette revendication d’une convention collective nationale a pour objectif d’attribuer les mêmes droits à tous les métallos de France, nous la demandons depuis 80 ans. Cette vision d’une Convention Collective Nationale de progrès social animera les futures générations militantes de la CGT, aujourd’hui comme demain.

En 2016, la FTM CGT a signé le premier accord de méthodologie qui définissait l’ensemble des thèmes et le déroulé de cette négociation historique. Nous nous y sommes engagés, pleinement inscrits, et nous avons été constructifs, force de propositions sur tous les thèmes négociés.

Voici quelques remarques sur les thèmes de cette négociation, non-exhaustives !

Thème 1 : principes, voies et moyens du dialogue social dans la branche

La FTM CGT a fait des propositions et le résultat est loin de nos attentes. Par exemple sur les moyens financiers attribués aux organisations syndicales représentatives pour participer aux réunions nationales, le montant prévu à l’article 37.2.1 n’est pas au niveau d’une véritable volonté qui permettrait un dialogue social digne d’une branche de 1,5 million de salariés.

Sans refaire l’exégèse des points de ce thème, on note que le calendrier de négociation de branche n’améliore pas le socle prévu par la loi. Il était loisible de rester à 3 ans, sur les thèmes 2° à 5° prévus par l’article L2241-1.

Thème 2 : la classification

La FTM CGT le redit, la classification doit servir à classer les salariés et non pas les postes de travail ! Les diplômes, les savoirs, les savoir-faire, la qualification, la compétence ainsi que l’expérience acquise, appartiennent aux salariés et non à la fonction tenue définie par le poste de travail. Une branche qui ne reconnaitrait plus les diplômes des jeunes générations, est une branche qui inévitablement se replierait sur elle-même et serait vouée, à terme, à péricliter.

La rupture sociétale voulue par l’UIMM sur ce point aussi important, condamne à brève échéance notre branche à voir partir ces jeunes diplômés vers d’autres horizons bien plus attractifs. Aucun parent n’accepterait de voir son enfant, après plusieurs années d’études pour être diplômé, se diriger vers des métiers où le diplôme ne serait plus reconnu à la hauteur des efforts consentis par l’ensemble de la famille.

D’ailleurs, il est fort à parier que les entreprises trouveront d’elles-mêmes des outils pour
contourner ce dogme patronal archaïque, qui est en rupture totale avec les besoins de
compétences exprimés dans les territoires.

Autre élément sur ce sujet, la complexité dans la mise en œuvre du dispositif. Nombre d’entreprises ne respectent pas le guide pédagogique ni les fiches de postes, alors même que la nouvelle classification n’est pas encore en vigueur ! C’est dire que ce projet est déjà contesté dans sa construction et surtout, qu’il ne correspond pas aux attentes des employeurs et encore moins des salariés !

Enfin, l’absence de visibilité sur le déroulement de carrière et le risque pour les salariés d’avoir une classification en dents de scie durant la carrière sont évidents, cela n’est pas acceptable.

La FTM CGT a mis sur la table un projet complètement différent de celui de l’UIMM, avec
un système à double entrée : une entrée au regard des diplômes, et l’autre en lien avec les savoirs et savoir-faire, l’ensemble avec la volonté de mettre le salarié au centre du dispositif de la classification.

Thème 3 ; organisation du travail/ temps de travail

L’UIMM a imposé, pour tous les salariés, une augmentation du temps de travail et de la
flexibilisation « no limit », pour soi-disant « l’amélioration de la compétitivité des entreprises face à la concurrence mondiale ». Ces reculs sociaux portent sur la remise en cause des 35 heures avec l’explosion des heures supplémentaires, l’augmentation de la durée maximale hebdomadaire, la réduction des garanties collectives relatives aux temps de déplacement et de leur indemnisation.

La non prise en compte du temps d’habillage et de déshabillage, comme du temps de travail effectif, et l’absence de volonté de limiter le travail de nuit aux seules activités où cela est nécessaire, sont révélateurs d’un risque de dégradation des conditions de travail des salariés de la branche.

Il est aberrant de voir une branche vouloir fortement augmenter le temps de travail des salariés qui ont un emploi, alors qu’il y a tant de salariés en souffrance au chômage ou en intérim.

Nous réaffirmons notre revendication d’une réduction du temps de travail à 32H00 et à 200 jours/an pour les forfaits jours, afin de permettre à chaque salarié de pouvoir travailler moins, de travailler mieux, et de travailler toutes et tous.

Thème 4 : santé, sécurité, conditions et qualité de vie au travail

Ce thème a été marqué par une absence de volonté de prendre réellement des mesures contraignantes pour les entreprises, pour améliorer les conditions de travail et la Qualité de Vie au Travail. La responsabilité a été renvoyée au comportement individuel de chaque salarié. De manière implicite ou explicite, le salarié est responsabilisé, voire culpabilisé, dans son rapport au travail.

L’UIMM a créé un recueil de bonnes intentions au bon vouloir de l’employeur, par une démarche proportionnée aux besoins de l’entreprise sous le socle minimal du Code du travail. Pour nous, ce texte manque d’ambition et de volonté pour avoir une véritable prise en compte des conditions de travail actuelles, et influer sur l’organisation du travail dans l’entreprise.

Thème 5 : relation individuelle

La FTM CGT a fourni un texte complet sur le sujet avec l’objectif d’harmoniser par le haut
les droits existants en territoires. Notre projet traite :

- d’un meilleur encadrement de la mobilité,
- du maintien des jours de congés supplémentaires,
- de l’acquisition d’un jour de congé dans le cadre de la QVT,
- de la protection du salarié en cas d’inaptitude,
- de la garantie de l’emploi en cas de maladie,
- du maintien des congés en cas de maladie pendant les vacances,
- de l’harmonisation de l’indemnité conventionnelle de licenciement pour tous les salariés et la majoration pour les plus de 50 ans.

Aucune de ces demandes n’a été entendue. Pire encore, le licenciement devient possible à tout moment en cas d’arrêt maladie, et les mensuels voient se durcir les conditions d’octroi d’un 3ème jour de congé supplémentaire pour ancienneté. Un seul point positif est à relever, c’est la mise en place d’un congé pour enfant malade.

Thème 6 : emploi et formation

La CGT s’est déjà prononcée sur ce thème et n’a pas été signataire de l’accord en 2019.

Thème 7 : protection sociale

Sur ce thème, l’UIMM a toujours voulu parler prix, avant de parler des garanties, or ce n’est pas ainsi que ce sujet doit être abordé, la FTM CGT l’a dénoncé depuis le début. Sur la complémentaire frais de santé, la proposition de l’UIMM est sur un socle minimal, avec un régime de niveau B qui est loin de ce qui avait été demandé collectivement. Le socle revendiqué par la FTM CGT en termes de santé correspond au dispositif existant en Isère.
C’est le seul département en France qui dispose d’une véritable protection sociale en santé et en prévoyance.

Sur la question du prix, le scénario B est arrêté sur le tarif de 44€ avec une répartition du
tarif à 50/50 entre l’employeur et le salarié. Notre crainte sur ce scénario, c’est qu’il risque d’être inférieur à bon nombre d’accords existants dans les entreprises. Cette situation expose donc les salariés et leurs représentants à une potentielle renégociation à la baisse de la complémentaire de frais santé existante, pour venir se caler sur le socle de santé de la branche.

Sur la prévoyance lourde (Incapacité, Invalidité, Décès), on se retrouve avec deux dispositions totalement différentes entre les cadres et les non-cadres. Pour les cadres, la Garantie de Maintien de Salaire (GMS1) reste au statu quo de l’existant avec deux temps d’indemnisation. Pour les salariés non cadres, la Garantie de Maintien de Salaire (GMS3) va dans le bon sens par rapport à l’existant, mais reste néanmoins inégalitaire vis-à-vis des Ingénieurs et Cadres.

Concernant les garanties sur la prévoyance, les écarts sont énormes entre les deux catégories socio-professionnelles.

Sur la répartition des cotisations, la proposition pour les mensuels n’est pas acceptable, 57% pour les salariés et 43% pour les entreprises, rien ne peut justifier cela. Certes, les cadres, du fait du 1,5%, ont leurs cotisations prises en charge à 100% par l’employeur, mais les mensuels ne peuvent pas être les laissés pour compte de cette obligation de l’ANI. La revendication de la FTM CGT pour les mensuels, c’est une répartition de 60% pour l’employeur et de 40% pour le salarié.

Notre revendication n’est pas de prendre chez les uns pour donner aux autres, mais bien
d’avoir des garanties communes pour les cadres et les non-cadres, notamment sur l’incapacité au-delà de la GMS, et sur l’invalidité et le décès. Sur ce dernier point, rien ne peut justifier que la vie d’un mensuel soit différenciée par rapport à celle d’un cadre. La vie d’un être humain doit être assurée au même niveau, quelle que soit la fonction tenue dans l’entreprise.

Enfin, sur le jour de carence, cela aura été le cheval de Troie de l’UIMM. Sur ce thème 7, l’UIMM a annoncé le pire pour tenter de nous donner le sentiment de gagner quelque chose.

Thème 8 : rémunération

La CGT a revendiqué le maintien de la progressivité de chaque mini garanti. L’Uimm n’a pas tenu compte de notre demande. Cette absence de progressivité associée à une faiblesse du niveau des minis a pour conséquence, que le début de la grille proposée sera déjà en dessous du SMIC au 1er janvier 2022. C’est d’ailleurs pour éviter cette situation que nous avons revendiqué un début de grille à 1800€ pour être ainsi significativement décollé du SMIC.

Ce thème est en lien direct avec le thème classification. Nous avons bien mesuré qu’il n’y
aura plus de déroulement de carrière automatique comme nous le connaissons aujourd’hui, ni de reconnaissance des diplômes comme détaillé précédemment.

La FTM CGT a fait des propositions qui sont en opposition radicale avec le projet de l’UIMM. Notre objectif est de permettre au salarié une reconnaissance professionnelle tout au long de sa carrière.

Concernant la prime d’ancienneté, la FTM CGT a fait remarquer que la majoration prévue
par les différents taux (voir notre tract sur la prime d’ancienneté) n’est pas au bon niveau
pour sécuriser l’existant. Là encore, pour aller vers une sécurisation et une simplification, la CGT a revendiqué que le calcul de la prime soit fait sur le salaire de base.

Concernant les primes en territoires, bon nombre d’entre elles ne seront pas sécurisées par le projet national, comme l’interruption de travail, le temps de douche, le remplacement d’un salarié à un poste supérieur, etc.

Concernant la prime de nuit, le constat est négatif là aussi, la proposition de l’Uimm va conduire à un montant de prime a minima. Plus de la moitié des Conventions Collectives Territoriales verront la prime de nuit diminuer par rapport à l’existant, ce sont encore les salariés qui seront lésés.

Pour la FTM CGT, il n’est pas concevable qu’un salarié puisse perdre des droits au 1er janvier 2024 alors qu’il en a bénéficié au mois de décembre 2023.

Concernant la garantie de maintien de salaire conventionnelle, que dire... C’est la cerise sur le gâteau !! La complexité juridique et technique de cette disposition la rend de facto
quasiment inapplicable à l’entreprise, ou alors de manière partiale, sans que le salarié dispose d’un réel moyen de contrôle, pour être sûr d’obtenir son dû.

La FTM CGT n’a eu de cesse de revendiquer que soient intégrées au niveau national, les dispositions d’application générales qui existent dans toutes les conventions collectives et en parallèle, la sécurisation des dispositions spécifiques en territoires. L’avantage de notre proposition, c’est la clarté, la sécurisation, la transparence et l’équité.

Seul point positif, l’assiette de comparaison des salaires minima garantis.

Concernant la rémunération des alternants en apprentissage ou en contrat de professionnalisation,

Pour la FTM CGT, il n’est pas normal d’appliquer à la rémunération des alternants, une classe d’emploi inférieure au diplôme préparé. On ne peut pas admettre qu’un jeune préparant un diplôme d’ingénieur ne soit pas rémunéré au niveau F, mais au niveau B, cela n’a pas de sens.

Thème 9 : dialogue social

La FTM CGT a relevé des prises en compte par l’UIMM sur les propositions des organisations syndicales et notamment sur le détachement syndical. Cependant, il reste encore beaucoup de points à travailler sur ce thème. Sur ce sujet, on retrouve surtout le cadre légal. La FTM CGT l’a réaffirmé, le dialogue social ne doit pas et ne peut pas être professionnalisé.

Il est donc important d’avoir des garde-fous et des outils pratiques pour les acteurs du dialogue social. La période de la pandémie nous a montré qu’il y a nécessité d’avoir au sein des entreprises, un dialogue social de qualité et des outils de communication pour répondre aux attentes des salariés. Nous sommes encore bien loin d’un niveau satisfaisant quand on voit tout ce qui se passe dans les entreprises.

En conclusion

Tout d’abord, la structuration de ce dispositif conventionnel aura été à l’image de nos six
années de négociation, l’UIMM écoute poliment les organisations syndicales, mais ne les
entend pas ou alors à la marge, avec quelques propositions accessoires qui n’impactent pas le fond. Pendant ces six années, la FTM CGT a été force de propositions sur tous les thèmes.

Malheureusement le constat que l’on peut faire, c’est que très peu d’éléments ont été retenus de la part de l’UIMM. On ne peut que le déplorer car dans cette négociation reconnue par tous comme étant historique, nous aurions dû être novateurs, constructifs et surtout attractifs pour les futurs salariés de la branche et fidéliser ceux déjà présents.

En 2016, nous avions fondé beaucoup d’espoirs sur une convention collective nationale de progrès social. Malheureusement il n’en sera rien ! L’UIMM de 2021 reste campée sur la politique patronale de 1900 de Robert Pinot, dans l’esprit que les richesses créées à l’entreprise par les salariés ne sont pas faites pour être partagées par l’ensemble des travailleurs de la branche. Le seul point que l’on peut partager avec l’UIMM, c’est le titre de ce document de 235 pages « une convention collective nationale de la métallurgie ».

Passé ce titre, le contenu ne correspond pas avec l’objectif ambitieux ! Nous sommes bien sur un dispositif conventionnel, une boîte à outils au profit des employeurs dans laquelle ils viendront faire leur marché pour améliorer la compétitivité financière tant convoitée. L’UIMM a affiché la volonté que ce nouveau dispositif ne coûte pas plus cher aux entreprises. Son fil conducteur pour chacun des thèmes aura été respecté à la lettre, et l’iso-coût tenu !

Dans le texte du 27 juin 2016, il est indiqué : « Les parties considèrent que l’appréciation du caractère équilibré du nouveau dispositif conventionnel ne pourra s’opérer que de manière globale, au terme des négociations. » Pour la FTM CGT, nous l’affirmons haut et fort, il n’y a pas d’équilibre dans ce dispositif conventionnel. Il n’y a même pas d’iso-coût. Nous sommes dans le moindre coût pour les entreprises et ceci sur le dos des travailleurs, ceux-là même qui créent les richesses. Le capital va pouvoir prospérer et les actionnaires empocher les dividendes générés par le travail des salariés de la branche. En somme, on ne change pas une équipe capitalistique qui fera perdre de l’attractivité à la branche et qui coûtera des sommes astronomiques !!

A l’inverse de la vision mortifère et rétrograde du projet de l’UIMM, notre revendication d’une convention collective de haut niveau a pour objectif de renforcer l’industrie en France, d’aider aux relocalisations, de sécuriser les sous-traitants vis-à-vis des donneurs d’ordres, et de permettre de développer les emplois et l’industrie de demain avec des garanties sociales pour les travailleurs de la branche, dignes du 21ème siècle.

Nous ne pouvons que constater que des groupes comme Renault, Peugeot, Arcelor, Airbus et bien d’autres, font déjà de votre dispositif un outil aux profits des actionnaires. Dans cette négociation, la FTM CGT a informé et formé ses élus, mandatés et syndiqués, ainsi que les salariés, sur l’ensemble des dispositions de ce projet.

Notre conception de la négociation est telle, qu’elle ne peut se faire qu’avec les principaux intéressés, à savoir les salariés que nous représentons. C’est notre démarche syndicale démocratique depuis toujours. C’est pour cela que nous avons annoncé publiquement le lancement d’une consultation nationale de l’ensemble des salariés de la métallurgie, qui permettra lors de notre prochain congrès fédéral de début 2022, d’arrêter la position de la Fédération des Travailleurs de la Métallurgie CGT sur l’ensemble de ce dispositif.

Ne croyez pas que le sujet sera clos si la négociation se conclue dans les prochains jours ou les prochaines semaines. Tout est à construire, les salariés en sont bien conscients. Ne croyez pas à la victoire de votre camp sur celui des travailleurs grâce à ce texte, rien n’est gravé à jamais dans le marbre, hormis sur les stèles !
 
L’UIMM ne sortira pas grandie de cette longue séquence de négociation trop souvent biaisée, soyez-en convaincus. L’intervention et la mobilisation des salariés pour changer le cours des choses vont continuer dans les territoires et les entreprises, nous pouvons vous le garantir."

Publié dans Social, Industries

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article